Bioastronomie - La vie autour des étoiles géantes rouges - Partie 2
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La vie autour des étoiles géantes rouges
Evolution de la zone habitable
Pour une étoile de 1.5 M¤, l'évolution de la zone habitable est beaucoup plus rapide car l'étoile évolue chimiquement plus rapidement qu'une étoile de 1 M¤. Les figures 2(a), 2(b) et 2(c) illustrent cette évolution en représentant les limites intérieure et extérieure de la zone habitable, le rayon de l'étoile et la durée de transit de la zone habitable.>
Pour une étoile de la Séquence principale, la durée du transit de la zone habitable à 3 U.A. dure plus d'un milliard d'années. A 5 U.A. le transit peut durer entre 100 millions et plusieurs centaines de millions d'années en fonction de la taille de la zone habitable. Il est intéressant de noter que bien que l'étoile évolue rapidement, la durée du transit de la ZH à des distances inférieures à 15 U.A. de l'étoile reste supérieure à 10 millions d'années.
Pour une étoile de 2 M¤ qui se situe sur la Séquence principale illustrée par les figures 3(a), 3(b) et 3(c), la zone habitable se situe à environ 5 U.A. Après avoir quitté la Séquence principale, la zone habitable perdure plus de 100 millions d'années pour des distances inférieures à 10-15 U.A. Notons que la ZH persiste durant 1.7 milliards d'années environ mais la période de transit peut localement durer moins de 25 millions d'années (Figure 3(a)).
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Les calculs précédents sont basés sur l'évolution de la zone habitable pour des étoiles dont la masse oscille entre 0.8 et 1.2 M¤ sur la Séquence principale et qui l'ont quittée au moment de l'épuisement des réserves d'hydrogène dans le noyau pour entamer le premier flash de l'hélium. Après cet événement, les étoiles de cette catégorie connaissent une longue période de calme où elles entament un long processus de fusion de l'hélium durant lequel elles présentent une luminosité quasi constante.
A partir de leur masse initiale, on peut ainsi interpoler la durée de vie de chaque étape de la vie d'une étoile : Séquence principale, phase sous-géante, géante rouge, flash de l'hélium, premières et secondes phases de fusion de l'hélium, etc.
Le tableau suivant représente la durée de vie des étoiles ayant respectivement des masses de 1.0, 1.5 et 2.0 M¤ sur la Séquence principale. Pour une étoile de 1 M¤, juste après le flash de l'hélium la fusion de l'hélium nucléaire prolonge la durée de la zone habitable d'un milliard d'années et plus longtemps encore pour les étoiles plus massives.
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Durant la phase de fusion de l'hélium, la luminosité des étoiles est d'approximativement 230 L¤ pour 1 M¤, 930 L¤ pour 1.5 Ms et à nouveau 230 L¤ pour 2 M¤. Pour une étoile de 1 M¤, durant la phase de fusion de l'hélium il existe donc une période supplémentaire d'habitabilité dans la région comprise entre 7 et 22 U.A.
Pendant le stade RGB et du fait de l'augmentation de la luminosité de l'étoile (Fig.1), la zone habitable se déplace rapidement vers l'extérieure au point que le rayon intérieur de la ZH > 20 U.A. Rapporté au système solaire, cela correspond à l'orbite d'Uranus.
Une fois l'étoile installée dans la fusion de l'hélium, la région située entre 7 et 22 U.A. devient à nouveau habitable. Il s'offre donc un "nouveau départ" pour la vie à cette période de l'évolution stellaire. Cette dernière phase est particulièrement intéressante car elle est très longue et rapportée au système solaire elle comprend les orbites de deux planètes géantes.
Possibilités de vie autour des étoiles géantes rouges
Nous avons vu dans l'article consacré aux origines de la vie, que les plus anciennes traces de vie remontent entre 3.80 et 3.85 milliards d'années, à peine 700000 ans après la naissance de la Terre. Les plus anciens organismes sont âgés de 3.50 milliards d'années et seraient représentés par des cyanobactéries photosynthétiques vivant dans les océans et probablement des colonies de microbes extrêmophiles vivant près des évents (fumeurs) des volcans sous-marins ou des sources chaudes en surface.
En raison de l'évolution rapide d'une étoile lorsqu'elle a quitté la Séquence principale, la durée du transit de la zone habitable diminue. Pour une étoile évoluée de 1 M¤, le transit de la ZH à 2 U.A. dure un peu plus d'un milliard d'années, une échelle de temps clairement supérieure à ce qui fut requis pour voir la vie émerger sur Terre.
A environ 5 U.A. de distance, la durée des conditions habitables dure entre 100 millions et plusieurs centaines de millions d'années, ce qui est dix fois inférieur au temps nécessaire à l'émergence de la vie sur Terre.
Même si l'apparition de la vie demande plus de 100 millions d'années, il est possible que des formes prébiotiques (des formes connues sur Terre) puissent s'adapter d'elles-mêmes sur une planète contenant de l'eau liquide.
La théorie de la panspermie nous rappelle que des micro-organismes pourraient être transportés d'une planète sur laquelle la vie est en phase terminale vers un autre astre où les conditions de sa renaissance sont assurés suite au passage d'une zone habitable. Ce type de processus pourrait être unique ou se rencontrer exclusivement autour d'étoiles évoluées. Compte tenu de nos moyens, il est malheureusement impossible de confirmer cette hypothèse mais elle ne peut pas être écartée.
Des vecteurs comme les météorites ou les comètes pourraient transporter ces organismes d'une planète à l'autre et déclencher le développement de la vie autour d'étoiles évoluées. Cette théorie fut développée dès 1903 par le Suédois Svante Arrhénius et sera reprise notamment par l'ingénieur en aérospatial Robert Zubrin en 2001 qui, rappelons-le, est également directeur de la Mars Society. L'idée qu'il existerait un transport de matériel entre les systèmes planétaires a récemment été revitalisée par la possible découverte de micrométéores extrasolaires (Meisel et al., 2002). Bien sûr les échelles de temps sont plus longues du fait que les distances sont plus grandes. Mais nous savons que depuis que la Terre porte la vie, des météorites ou des comètes ont pu être expulsées du système solaire depuis 3.5 milliards d'années, emportant avec elles des biomolécules ou même des micro-organismes primitifs. |
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Robert Zubrin devant l'une des stations FMARS installée sur l'île de Devon au Canada, à 1450 km du Pôle Nord. |
Après un voyage d'un milliard d'années ou plus dans le vide interstellaire, ces astres ont pu être capturés par des systèmes planétaires proches (jusqu'à 100 a.l) et en quelque sorte polleniser le ferment fertile des autres planètes qui n'attendaient qu'un germe pour voir la vie se développer.
Dans un article publié dans Sciences en 1996, B.Gladman et son équipe ont montré que la probabilité d'expulser une météorite ou une comète d'un système planétaire n'est pas négligeable. La question en suspend est de savoir qu'elle est la probabilité de capture par une exoplanète. Des calculs réalisés par Jay Melosh en 2003 suggèrent que la probabilité de transfert interstellaire de matériel météoritique entre planètes de systèmes différents (proches et ne contenant qu'une seule étoile) est extrêmement faible. Toutefois, dans les environnements d'étoiles géantes, la probabilité de capture de matériel éjecté d'une planète est raisonnablement plus large. En utilisant ce mécanisme, la vie pourrait être transportée d'une planète à l'autre durant l'expansion de la zone habitable.
Lorsque nous avons discuté de la faculté d'adaptation, nous avons démontré que tant en laboratoire que dans l'espace, des micro-organismes pouvaient survivre aux conditions interplanétaires d'un voyage spatial : ils sont par exemple capables de survivre aux très basses températures, à la déssication, au vide, aux rayonnements UV et cosmique, aux acides et même au chocs (pressions) extrêmes sur une surface solide.
Toutes ces considérations renforcent la théorie de la panspermie et d'une possible "fertilisation" entre planètes. Si nous prenons l'exemple de notre système solaire, à 1.5 ou 2 U.A. il est possible qu'à l'avenir et en assumant que de l'eau liquide puisse exister durant une période de temps compatible avec l'apparition de la vie sur Terre, la vie puisse apparaître sur Mars à la condition que l'eau aujourd'hui gelée se mette à fondre. C'est également l'une des théories proposées pour le terraforming de Mars. De l'eau liquide peut également apparaître sur Europe, l'une des lunes de Jupiter comme une suite logique de l'évolution du Soleil et de l'augmentation de son diamètre.
Mais comme Mars, Europe présente une masse trop petite et ne pourrait pas maintenir son atmosphère sans intervention de notre part, si bien qu'à terme Europe est également condamnée à mourir, cette fois pour de bon. Un astre plus massif comme Titan, le plus gros satellite de Saturne est mieux adapté pour abriter la vie. A 10 U.A. le transit de la zone habitable peut durer entre 10 et 100 millions d'années.
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Bien entendu ces scénarii assument que les mouvements planétaires resteront stables durant les 6 milliards d'années à venir. Du point de vue des changements de la dynamique orbitale relative à l'évolution stellaire, cette présomption paraît raisonnable.
Les effets du phénomène de perte de masse stellaire et la dissipation des marées entre les planètes et l'étoile géante rouge ne sont pas négligeables dans la dynamique orbitale. Une étoile solaire perd environ 24% de sa masse initiale durant la phase RGB et environ 20% durant la phase AGB.
Le transit de la zone habitable que nous avons calculé se produit au cours de la phase RGB, à une étape durant laquelle le rayon de l'étoile est inférieur à 100 R¤ environ. Dans la Fig 2. (cf haut de page) on constate que lorsqu'une étoile comme le Soleil atteint un rayon d'environ 100 R¤, seul un peu plus de 10% de sa masse initiale se dissipe dans l'espace, ce qui a pour effet de modifier la dynamique des orbites planétaires (pour les planètes situées à plus de 1 U.A. non sujettes aux forces de marées) en augmentant leur demi-grand axe de 10%.
Notons que si l'accroissement du demi-grand axe se produit durant la période où la planète se trouve dans la zone habitable (elle-même en expansion), cet effet a pour conséquence d'augmenter la durée des conditions habitables sur cette planète.