Théorie du Complot - Partie 2
Facteurs de développement du conspirationnisme[modifier]
Véronique Campion-Vincent distingue deux écoles des sciences humaines des années 1960, pour expliquer les causes du développement des théories du complot. Un premier courant d'explication repose sur la psychologie, en particulier sur la psychologie sociale, et tend à déprécier les conspirationnistes en présentant les théories du complot comme une pathologie mentale. Un autre courant d'explication, moins dépréciatif que le premier, repose sur la sociologie et lie l'émergence du conspirationnisme à la société postmoderne.
Explications par la psychologie individuelle[modifier]
Plusieurs biais cognitifs peuvent favoriser les interprétations conspirationnistes :
- biais de confirmation d'hypothèse : accorder plus de poids aux preuves qui confirment les croyances de départ[34] ;
- effet de récence : tendance à mieux se souvenir des dernières informations auxquelles on a été confronté ;
- biais sur le négatif : tendance à prêter davantage attention aux éléments négatifs ;
- illusion des séries : percevoir à tort des coïncidences dans des données au hasard ;
- dissonance cognitive : réinterpréter et éliminer les faits en contradictions;
- effet de simple exposition : augmentation de la probabilité d'avoir un sentiment positif envers quelqu'un ou quelque chose par la simple exposition répétée à cette personne ou cet objet ;
- biais de disponibilité : ne pas chercher d'autres informations que celles immédiatement disponibles ;
- effet de mode : acceptation plus facile quand un grand nombre de personnes croient une information ou pratiquent un comportement donné ;
- oubli de la fréquence de base : oublier de considérer la probabilité statistique lorsque survient un événement ;
- focus : donner trop d'importance à l'aspect d'un événement modifie les perceptions suivantes ;
Une trentaine de biais cognitifs faussant nos interprétations, ont été répertorié (Voir aussi la liste plus complète en anglais). Ces biais cognitifs sont des erreurs de raisonnement qui ne constituent pas en soi un comportement pathologique.
Pour ce qui est des théories du complot elles-mêmes, certains psychogues en font le symptôme d'une forme de paranoïa, en particulier du délire d’interprétation de Sérieux et Capgras, trouble psychiatrique dont le thème délirant du complot est constitutif[réf. nécessaire]. Cependant, cette interprétation est majoritairement considérée comme insuffisante, dans la mesure où elle ne prend pas la peine de s'intéresser à la théorie du complot sur le plan de la finalité, de sa « fonction ».
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L'explication par la psychologie sociale repose notamment sur les travaux de la professeur de théorie politique Hannah Arendt[37], qui relie le conspirationnisme à un « besoin de cohérence », de l'historien américain Richard Hofstadter[11], qui évoque « un style paranoïde » de la politique, les travaux du politologue français Raoul Girardet[30] ou ceux des psychologues Carl F. Graumann et Serge Moscovici[38], qui parlent de « mentalité du complot ». D'après leurs travaux, la qualité persuasive des théories du complot repose sur les éléments suivants, qui ont en commun de compenser un sentiment d'impuissance :
- Les théories du complot fournissent une logique unificatrice à des éléments apparemment disparates et non liés entre eux, ce qui est intellectuellement satisfaisant. Hannah Arendt écrit que les théories du complot répondent à un besoin des foules, qui « ne font confiance ni à leurs yeux ni à leurs oreilles, mais à leur seule imagination, qui se laissent séduire par tout ce qui est à la fois universel et cohérent en soi-même »[39]. Elle souligne que cette « fuite des masses devant la réalité est une condamnation du monde dans lequel elles sont contraintes de vivre et ne peuvent subsister, puisque la contingence en est devenue la loi suprême et que les êtres humains ont besoin de transformer constamment les conditions chaotiques et accidentelles en un schéma d'une relative cohérence »[40]. De même, l’historien Jean-Philippe Schreiber et la linguiste Emmanuelle Danblon (Université libre de Bruxelles) estiment que la théorie du complot « permet à l’individu de donner du sens à ce qui l’entoure, ce qui semblerait être une condition essentielle à son inscription dans le monde »[41]. La théorie du complot répondrait, dans cette perspective, aux besoins de compréhension des sociétés en crise en identifiant une causalité simple et unique à tous les bouleversements que l'individu ou les masses peuvent subir. Comme le souligne l'historien Raoul Girardet[30], cette utilité sociale en fait une variété du mythe. Le conspirationnisme établit une grille interprétative simple, fondée à la fois sur des préjugés et une certaine forme de bon sens populaire, et dans laquelle s'insère nombre d'événements du temps présent (en particulier les plus déroutants et angoissants). En identifiant des responsables, le monde est simplifié à une vision manichéenne ancestrale, avec un Bien et un Mal nettement définis.
- Les théories du complot donnent accès à une vérité cachée, ce qui est valorisant pour celui qui reçoit le message. Le philosophe français Robert Redeker évoque dans Le Monde du 30 mars 2008 les « avantages narcissiques de la croyance en cette théorie : son adepte s’épanouit dans le sentiment de détenir un secret d’une extrême importance. Il jouit d’en savoir plus que les plus grands savants ! »[42]. Sur son site Web dédié à l'inexpliqué et aux subcultures qui gravitent autour, Jérôme Beau explique qu'une personne adhérant aux théories du complot « se positionne implicitement comme plus intelligente que celles qui se font avoir » ; face à son entourage, elle peut se sentir « supérieure » et potentiellement apte à sauver « ceux qui sont considérés « non informés », « naïfs » ou incapables de reconnaître les conspirations en question. »[43]
- Les théories du complot identifient des coupables en tendant à interpréter tout événement ou conséquence d'un événement comme ayant été voulus ; cette interprétation découle d'une généralisation de l’« imputabilité » du mal, d'une attribution de tout événement malheureux à une volonté. À la fin du Moyen Âge et à la Renaissance, de nombreuses personnes issues de catégories sociales marginales étaient accusées d'être responsables des événements mettant la vie sociale en danger : maladies, catastrophes naturelles détruisant les récoltes, etc. Cela donnait lieu à des chasses aux sorcières, au cours desquelles on les accusait d'avoir provoqué le malheur de la communauté à l'aide de démons ou de maléfices. Aujourd'hui encore, lors d'événements dramatiques, la tendance des médias, du public à chercher les coupables plus que les solutions peut influencer le citoyen, en le conditionnant à percevoir tout événement négatif selon ce mode “imputabiliste”[44]. C'est le sens implicite de la question « À qui cela profite-t-il ? », soulevée lors d'événements bouleversants. Une imputation systématique du mal peut donner lieu à un phénomène de victime expiatoire, où le malheur est conçu comme ne pouvant être réparé que par l'élimination de ceux qui l'ont souhaité, et où une catégorie d'individus, même innocents, peut être identifiée comme celle de responsables à châtier. De nos jours, les moyens d'action qu'on imagine être ceux des fauteurs de catastrophes ne sont plus des rites ou des recettes magiques, mais des moyens techniques et en particulier militaires. Le concept du complot est capable de s'adapter aux groupes les plus divers (par exemple : le Juif devenant tour à tour le capitaliste ou le communiste). Les théories du complot les plus puissantes auraient ainsi la capacité de perdurer dans le temps tout en se renouvelant, voire en se combinant : les « vieilles » théories du complot, comme celles du complot juif ou communiste, ont ainsi été combinées entre elles lors de la Révolution russe pour donner naissance au complot « judéo-bolchévique ».
- Les théories du complot peuvent expliquer d'éventuels échecs personnels. C’est, par exemple, l’explication classique donnée à l'antisémitisme d'Adolf Hitler dans le contexte de son parcours personnel. Le critique social H. L. Mencken, penseur individualiste et élitiste, voyait le conspirationnisme comme un symptôme de stupidité et une façon (qu'il dépréciait) d'éviter de se prendre en main et d'assumer ses failles. Le psychologue Julian Rotter distingue à ce titre deux profils psychologiques : les personnes croyant que leur sort est hors de leur influence, et celles croyant que les événements dépendent surtout d'elles-mêmes. Les premières ont un locus de contrôle dit « externe » : hasard, chance, fatalité, ou autre tout-puissant (dieu, société, autorités…), alors que les secondes ont un locus « interne ». Rotter relève qu'un locus de contrôle externe est en corrélation avec certains facteurs sociologiques, comme une catégorie socio-professionnelle défavorisée, un niveau d'éducation peu élevé, et/ou une culture communautaire (par opposition aux cultures individualistes, qui encouragent la responsabilité)[45]. Toutefois, le sociologue Cyril Lemieux estime que des théories du complot envers l'etablishment peuvent aussi émaner de citoyens diplômés ; il place l'origine du conspirationnisme dans un désir frustré de notoriété intellectuelle : « […] en raison de la massification de l'enseignement supérieur, notre société produit beaucoup de diplômés qui se sentent légitimement autorisés à penser qu'ils ont au moins autant de talent que les journalistes, les intellectuels, les artistes et les politiques les plus en vue médiatiquement, alors même qu'ils sont contraints, eux, [...] à l'invisibilité. Internet est un média qui leur permet de donner un début de visibilité publique à leurs productions et à leurs talents. Mais c'est aussi un média qui leur permet d'exprimer leurs sentiments d'injustice [...]. Le conspirationnisme, si en vogue sur Internet, n'est peut-être qu'une expression extrême de cette dénonciation [...]. »[46]
- Les théories du complot donnent l'espoir de pouvoir changer les choses. Les psychologues humanistes font valoir que, pour les théoriciens de la conspiration, même si le complot est angoissant, il est consolant de croire que ces bouleversements seraient dus à une volonté, plutôt qu'à des facteurs échappant à toute volonté. C'est un dispositif rassurant de croire que des accidents n'arrivent pas au hasard, mais seraient ordonnés par l'homme : rendant de tels événements compréhensibles et potentiellement contrôlables, il y a l'espoir, même faible, de pouvoir briser cette conspiration (ou d'y adhérer pour faire partie du pouvoir)[47]. Toutefois, cet espoir ne prend pas nécessairement la forme d'actions : le journaliste Alexander Cockburn souligne qu'en dépit des effets positifs, la théorie du complot relève « de l’infantilisme politique » et « imaginer qu’elle puisse déboucher sur une énergie progressiste revient à croire qu’un illuminé qui s’époumone au coin d’une rue révélera forcément des talents de grand orateur »[48].
Explications sociologiques[modifier]
Les explications sociologiques mettent prioritairement en avant les évolutions de la société pour expliquer l'apparition des théories du complot. Plusieurs interprétations existent :
- Pour un premier courant, c'est l'« excès d'institution » qui provoque le développement des théories du complot. Timothy Melley (Université de Miami), spécialiste de la culture populaire, parle d'une « agency panic »[51] : il voit dans le conspirationnisme l'expression d'une crise de l'individu et de son autonomie, ainsi que son angoisse face au pouvoir croissant, technocratique et bureaucratique, des administrations. Il considère en outre la théorie du complot comme un élément essentiel de la culture populaire américaine de l'après-1945[52],[53].
- Pour un autre courant, les théories du complot naissent, à l'inverse, de la « disparition des institutions structurantes ». Le juriste américain Mark Fenster[54] (Université de Floride) explique que le développement des théories du complot est le fruit du déclin de la société civile traditionnelle (l'encadrement par les corps intermédiaires classiques, les syndicats, les mouvements politiques) qui laisse désemparés les groupes les plus fragiles, notamment les personnes défavorisées (handicapés, familles défavorisées, personnes sans domiciles, afro-américains...). Les théories du complot, qui reflètent les insuffisances des institutions et la demande de plus de transparence de la part des citoyens, font partie intégrante du système politique démocratique et ne sont pas des phénomènes marginaux[55]. Pour Pierre-André Taguieff[56], les théories du complot, très médiatisées sur Internet, dans certains jeux (comme Illuminati, Deus Ex, Half-Life, Metal Gear) ou films (comme Ennemi d'État, X-Files, Prison Break), répondaient à un besoin de « réenchantement du monde », selon l'expression de Peter Berger : elles participeraient d'une reconfiguration des croyances et d'une sublimation du religieux sous une forme sécularisée. Insistant sur la déstructuration culturelle plutôt que politique ou religieuse, le sociologue français Jean-Bruno Renard (université Montpellier III) voit le terreau de développement des théories du complot dans la postmodernité : relativisme cognitif (Raymond Boudon), fragmentation en néotribus et en sous-cultures (Michel Maffesoli), dévalorisation des « canaux officiels de communication » (politiciens, médias), confusion accrue entre l'image et le réel[49].
La théorie du complot serait donc un palliatif face à l'annihilation de l'individu par des institutions trop présentes, ou à l'inverse face au vide provoqué par la vacance des institutions. Dans les deux cas, elle est une réaction à la perte du sens ordinairement assuré par un ordre social bien régulé.
La culture conspirationniste[modifier]
Principaux exemples[modifier]
Il existe de nombreuses théories du complot, qui attribuent des intentions perverses et un pouvoir démesuré à des catégories particulières d'individus (communistes, francs-maçons, juifs, lépreux) ou à des institutions (Eglise catholique, gouvernements, organisations internationales).
Complot des lépreux[modifier]
Au XIVe siècle, dans certaines villes en Europe, se développe l'idée d'un complot des lépreux, qui vont être persécutés et isolés dans certaines villes en France. On leur reproche de chercher à prendre le pouvoir et d'empoisonner l'eau. Ces accusations vont s'étendre aux juifs, qui auraient passé une entente avec les lépreux et le souverain musulman du royaume de Grenade. Ces peurs finiront par atteindre les présumés sorciers et sorcières aux quinzième et seizième siècle [57].
Complot juif et complot sioniste[modifier]
Complots bolchéviques et antibolchéviques[modifier]
L'URSS a eu recours à la théorie du complot, invoquant des complots des Mencheviks, des socialistes-révolutionnaires, des anarchistes ou de députés de l'ex-Constituante. Plus tard suivront la théorie du complot des Trotskystes qui aboutira à l'assassinat de Trotsky, le complot de sabotage des Koulaks ukrainiens pour expliquer la famine ukrainienne ou le complot des Jdanovistes, dit aussi « complot des blouses blanches », visant des médecins juifs, sous Staline, en 1950. Dans les années 1930, d'autres « complots » virtuels furent dénoncés et punis avec les Grandes Purges.
Inversement, la révolution bolchévique a pu également être dénoncée comme un complot, mené en particulier par le « judéo-bolchevisme ». À l'époque de la décolonisation, certains ont développé que les guerres d'indépendance, comme celle de l'Algérie ou d'Indochine, ne seraient pas le fait des masses populaires, mais de factions d'opposition armées et financées par le Parti communiste soviétique ou d'autres pays étrangers pour s'approprier les ressources naturelles du pays.
Complots maçonniques et Illuminati[modifier]
Les francs-maçons et des sociétés secrètes analogues, comme les Illuminés de Bavière, ont souvent été la cible de théories du complot, accusés qu'ils sont d'être une force agissant dans l'ombre. L'Affaire des fiches en 1904 – fichage secret et ségrégation politique et religieuse réalisés par l'obédience maçonnique Grand Orient de France contre les officiers catholiques – a ravivé l'imagination. En Turquie, la Révolution Kémaliste serait due à un complot de la loge Union et Progrès, qui a créé le parti Jeunes-Turcs[réf. nécessaire]. La propagande de Vichy attribue la défaite de la France en 1940 à l'influence pacifiste de la Franc-maçonnerie sur les gouvernements du Front Populaire[réf. nécessaire]. Un prétendu complot synarchique sera également dénoncé par le régime de Vichy.
Complots catholiques[modifier]
De nombreux ordres liés à l'Église ont été la cible de théories du complot à travers l'histoire, comme les Templiers[58]. L'Église elle-même a parfois été la cible du conspirationnisme : en 1678, le Popish Plot ou « Complot papiste », fausse accusation de conspiration portée envers les catholiques anglais, déclencha des persécutions, la promulgation de lois répressives, et des remaniements diplomatiques. Les Jésuites ont également été régulièrement visés dans de nombreux pays : au Portugal et en Espagne, en Chine et au Japon, en Pologne et en Allemagne. Dès le début du XVIIe siècle siècle, le faux Monita secreta les montre complotant pour conquérir l'influence politique et économique. Ils sont plus tard visés par une théorie du complot politique par les jansénistes et de nombreux protestants. Au XIXe siècle, ils sont désignés comme l'« Ordre noir » par Jules Michelet et Edgar Quinet qui attribuent, dans leur livre Les Jésuites, la Restauration et la Monarchie de juillet à un complot des jésuites. Les romans d'Eugène Sue (notamment le Juif errant, publié sous forme de roman feuilleton dans le contexte difficile de la révolution de 1848) se sont largement fait l'écho de ces croyances. Plus tard, l'Opus Dei passe à son tour pour une société secrète et financière qui contrôle les États.
Plus récemment, à travers les nouveaux mouvements religieux de la nébuleuse New Age et les ouvrages d'auteurs néo-gnostiques, une théorie du complot se répand selon laquelle l'Église de Rome serait une puissance conspiratrice depuis l'investiture de l'apôtre Pierre comme souverain pontife, et que Jésus aurait été victime d'un complot politique : son enseignement aurait été maltraité et expurgé de sa dimension essentielle pour maintenir les individus dans l'ignorance, notamment lors du premier concile de Nicée. On voit alors la prétendue vérité cachée « réapparaître » dans des publications contemporaines qui se proposent de réécrire l’histoire du christianisme : The Jesus Conspiracy de Holger Kersten et Elmar R. Gruber en 1994, The Templar Revelation de Lynn Picknett et Clive Prince en 1997, ou encore The Jesus Papers: Exposing the Greatest Cover-Up in History de Michael Baigent en 2006. Ces thèses pseudo-historiques se fondent en fait sur des écrits apocryphes rédigés entre les IIe et Ve siècles de notre ère, comme l’Évangile de Nicodème ou l’Évangile de Philippe, mais aussi des ouvrages beaucoup plus récents, comme L'Évangile du Verseau.
Complots d'organisations internationales[modifier]
À travers l'histoire, des organisations et des fondations politiques internationales ont été accusées de vouloir dominer secrètement le monde, comme le Groupe de Bilderberg ou la Commission Trilatérale[réf. souhaitée].
Complots américains[modifier]
Les États-Unis sont au cœur de nombreuses théories du complot. La question de l'intervention des multinationales américaines ou de la CIA dans les coups d'État de la seconde moitié du XXe siècle en Amérique latine (Chili, Bolivie, Panamá), est controversée. Leur intervention est parfois historiquement documentée (l'opération PBSUCCESS par exemple); alors que dans certains cas seuls des soupçons alimentent l'idée d'un complot. L'assassinat de John F. Kennedy n'a jamais cessé de susciter diverses théories, dont certaines accusent les services secrets américains (film JFK d'Oliver Stone : assassinat présenté comme une sorte de coup d'État camouflé).
Les attentats du 11 septembre 2001 sont actuellement l'objet de la théorie du complot la plus populaire selon le journal britannique The Economist[59]. On retrouve, par exemple, la mise en cause des services secrets américains pour réfuter l'implication des seuls pirates de l'air dans les attentats, résultant d'un complot intérieur aux États-Unis[60].
La rumeur sur le programme Apollo selon laquelle l'engin ne se se serait jamais posé sur la Lune et serait une mise en scène, entrent également, selon de nombreux commentateurs, dans le cadre d'une théorie du complot[61].
Plus récemment, le projet HAARP (High frequency active auroral research program) a été considéré par les adeptes de la théorie du complot[62] et par certains scientiques[63] comme étant à l'origine des tempêtes de fin décembre 1999 en Europe, du séisme de 2010 à Haïti, des incendies de forêt en Russie de 2010, inondations en Chine en 2010.
Pour Nicole Bacharan, politologue franco-américaine, la théorie du complot accuse systématiquement les services secrets américains de vouloir contrôler secrètement le monde. Elle ironise en affirmant : « Dans les théories du complot, il faut poser une fois pour toutes que l'Amérique a toujours tort et qu'elle a toujours de mauvaises intentions »[64].
Complot d'origine extra-terrestre[modifier]
Les principaux tenants de cette théorie sont Anton Parks et David Icke. Selon cette théorie, un nombre de preuves archéologiques important soutiendrait l'idée que toutes les théories du complot elles-mêmes auraient pour fonction de confondre les foules au sujet d'une vérité cachée, qui en fait masquerait une réalité plus grande et plus incroyable encore. Dans cette théorie, il est question d’extraterrestres dont le niveau de compréhension de la psychologie humaine permettrait depuis des millénaires d'inciter à des comportements préjudiciables pour soi et autrui, ceci dans le but de maintenir l'humanité dans des « vibrations basses », de manière à les détourner de toute forme de spiritualité, et donc de liberté. Cette domination invisible, dissimulée derrière une illusion démocratique, serait relayée par les gouvernements, consciemment ou non.
Théories du complot, rumeurs et canulars[modifier]
La théorie du complot doit être distinguée du canular et de la légende urbaine, même si elle s'en rapproche parfois. Les rumeurs selon lesquelles Adolf Hitler ou Elvis Presley seraient encore vivants, ou que Paul McCartney serait mort en 1966 et remplacé par un sosie, de même que certains canulars (notamment les canulars informatiques diffusés par chaîne de courriels), peuvent prendre la forme de théories du complot. La recherche sur certains sites de référence comme HoaxBuster ou Hoaxkiller permet d'infirmer ces canulars.
Dans la fiction[modifier]
- Le film Complots avec Mel Gibson, un chauffeur de taxi paranoïaque découvre qu'une de ses théories de complot est vraie.
- Les films : Arlington Road, The Parallax View, The Conversation, A Beautiful Mind, JFK, Nixon, I comme Icare, Ennemi d'État, Capricorn One, etc.
- Le film Invasion Los Angeles de John Carpenter, des extra-terrestres ont la ville et les États-Unis sous contrôle, en revêtant une forme extérieure humaine et s'accaparant tous les postes de l'élite politique.
- Les films Matrix réalisés par les Frères Wachowski pour un exemple de complot mondial impliquant le « monde des Machines »
- La série télévisée X-Files pour un exemple d'un complot mondial impliquant des phénomènes extra-terrestres.
- La série télévisée Le Caméléon (The Pretender) pour un exemple d'un complot mondial mettant en scène une organisation plus ou moins scientifique (Le Centre).
- La série télévisée Prison Break.
- La série télévisée Jericho.
- Les séries de jeux vidéo Deus Ex, Half-Life et Metal Gear dont leurs scénarios et leurs univers s'intéressent beaucoup à la théorie du complot.
- Le jeu de société Illuminati
- Les livres de David Icke : des lignées de reptiliens, les Annunakis, contrôlent secrètement la terre.
- Les livres de Don DeLillo
- Les livres de Thomas Pynchon
- Le livre Les arcanes du chaos de Maxime Chattam
- Le livre Les 4 côtés du triangle de Jean-Yves Martin
- Les livres de Robert Ludlum : Le Cercle bleu des Matarèse
- La bande dessinée XIII
- Pour mieux comprendre la vogue que connaît actuellement le concept de « théorie du complot », un exemple éclairant se trouve dans le chapitre 15 du livre de John Le Carré La Constance du jardinier.
- Les Carnets de Turner.
- L'Histoire Secrète, bande dessinée faisant un parallèle avec de vrais faits historiques, dans un monde contrôlés par les Archontes.
- Le jeu vidéo Assassin's Creed, mettant en scène les templiers des temps modernes agissant dans l'ombre à travers une entreprise pharmaceutique, Abstergo Industries.
- Dans la série Stargate SG-1, la Stargate Command basée à Cheyenne Mountain est classée Secret Défense mais des théoriciens du complot s'attaquent souvent au SGC pour prouver au monde l'existence de la Porte des Etoiles (Martin Lloyd, Joe Spencer,etc.)
Les œuvres de Philip K. Dick ont souvent pour thème des « visions du monde » imposées aux populations pour protéger des intérêts particuliers, ou bien pour effectuer une infiltration[65] - et dans tous les cas une difficulté à situer la réalité entre différentes interprétations possibles. Ces thèmes se retrouvent dans les romans précurseurs 1984 d'Orwell et Le Meilleur des mondes d'Aldous Huxley.
Notes et références[modifier]
- ISBN 0-8160-5540-8 The encyclopedia of conspiracies and conspiracy theories, Michael Newton,
- 2005, Bourin Éditeur, 232 p. (ISBN 2-8494-1025-X) Frédéric Charpier, L'obsession du complot,
- Marcel Gauchet, entretien paru dans les Collections de l'Histoire, n°33, octobre-décembre 2006, pp 60-67.
- http://ahrf.revues.org/7383 [archive] Éric Saunier, « Le message maçonnique au XVIIIe siècle. Contribution à l’histoire des idées », Annales historiques de la Révolution française [En ligne], 345 | juillet-septembre 2006, mis en ligne le 08 juillet 2008, consulté le 18 janvier 2011. URL :
- ISBN 1-892941-41-4 p. 4 Paul McLaughlin. Mikhail Bakunin: The Philosophical Basis of His Theory of Anarchism. 2002.
- Marx on the one hand, and of Rothschild on the other... This may seem strange. What can there be in common between socialism and a leading bank? The point is that authoritarian socialism, Marxist communism, demands a strong centralisation of the state. And where there is centralisation of the state, there must necessarily be a central bank, and where such a bank exists, the parasitic Jewish nation, speculating with the Labour of the people, will be found. »Judaica (1950), Historia judaica, Volumes 12-14, Verlag von Julius Kittls Nachfolger « This whole Jewish world, comprising a single exploiting sect, a kind of blood sucking people, a kind of organic destructive collective parasite, going beyond not only the frontiers of states, but of political opinion, this world is now, at least for the most part, at the disposal of
- La Société ouverte et ses ennemis (The Open Society and Its Enemies, 1945) ; la traduction française est un résumé.
- "It is the view that an explanation of a social phenomenon consists in the discovery of the men or groups who are interested in the occurrence of this phenomenon (sometimes it is a hidden interest which has to be revealed) and who have planned and conspired to bring it about." (p. 94).
- Popper Revisited, or What Is Wrong With Conspiracy Theories? [archive]" Philosophy of the Social Sciences.1995; 25: 3-34 republié dans Conspiracy theories: the philosophical debate, David Coady (ed.). Ashgate Publishing, Ltd., 2006 - 173 pages Pigden, Charles. (1995) "
- (en) Bratich, Jack Z., Conspiracy panics: political rationality and popular culture, Albany, N.Y, State University of New York Press, 2008 (ISBN 0-7914-7334-1)
- 1965 The Paranoid Style in American Politics and Other Essays,
- « using the expression "paranoid style", I am not speaking in a clinical sense, but borrowing a clinical term for other purposes. I have neither the competence nor the desire to classify any figures of the past or present as certifiable lunatics ... It is the use of paranoid modes of expression by more or less normal people that makes the phenomenom significant. » (p. 3-4)
- « The turn from personality type to style is a shift in problematization. Problematization no longer seeks to categorize individual "actors", but to establish a manner of thinking that could be taken up by any political actor. ... It is a mimic of reason and thus needs constant vigilance. ... The paranoid style in its domestically populist form is not simply exiledto the outside of normal political discourse; it is a danger that constantly threatens from within. While it is banished to the fringes of official thought it is also among us, lurking within the nation, in the heartland, among the populace. It is not one of "us", but it could be anyone. »
- P. A. Taguieff, L'Imaginaire du complot mondial, pp. 57-60.
- Ariane Chebel d'Appollonia, L'Extrême-droite en France. De Maurras à Le Pen, Bruxelles, Éditions Complexe, 1996, p. 72.
- Patrick Champagne et Henri Maler, « « La théorie du complot » en version France Culture (par P.-A.Taguieff, savant) » [archive], Acrimed, 1er février 2010
- Noam Chomsky, Rethinking Camelot: JFK, the Vietnam War, and U.S. Political Culture, South End Press, 1999.
- « Et un jour ils se disent : Ah, voilà ce que je peux faire : devenir en une heure ingénieur qualifié en génie civil et prouver que c’est Bush qui a fait sauter les tours jumelles » [archive], Bakchich, 9 septembre 2008.
- Noam Chomsky, Comprendre le pouvoir : tome I, Aden, 2005, p. 56-57.
- (en) Edward Herman, « The Propaganda Model Revisited » [archive], Monthly Review, juillet 1996.
- Présentation de l'ouvrage par l'éditeur [archive]
- Webster G. Tarpley, La Terreur fabriquée, Made in USA, éditions Demi-Lune, 2006, p. 398.
- ISBN 0-7100-4626-X), page 95 The Open Society and Its Enemies Volume 2: Hegel and Marx, édition 1973 (
- Popper, ibid, chapitre 14, p. 96
- Emergence: The Connected Lives of Ants, Brains, Cities and Software, Steven Johnson
- ISBN 978-2-2640-3877-7), p. 392 Toni Negri & Michael Hardt, Empire, Éditions 10/18, 572 pp., 2000 (réédition 2004) (
- Leman Patrick, Who shot the president? Why are conspiracy theories believed?, The British Psychological Society, mars 2003
- [1] [archive]. Douglas K.M. and Sutton R.M. The hidden impact of conspiracy theories: Perceived and actual impact of theories surrounding the death of Princess Diana. [20] Journal of Social Psychology (2008)
- ISBN 0-5202-3805-2) Barkun, Michael (2003). A Culture of Conspiracy: Apocalyptic Visions in Contemporary America. University of California Press; 1re édition. (
- Mythes et mythologies politiques, 1986.
- Compte rendu de l'ouvrage de Véronique Campion-Vincent [archive]
- Le terme anti-individuel n'est pas d'elle, mais semble bien résumer sa pensée.
- http://cat.inist.fr/?aModele=afficheN&cpsidt=20238902 [archive] Compte rendu de l'étude dans la Revue internationale de psychologie sociale, 2007, volume 20, n°4
- Biais de confirmation Wason, Peter C., On the failure to eliminate hypotheses in a conceptual task, Quarterly Journal of Experimental Psychology (Psychology Press) 12: 129–140 (1960) -
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- Hannah Arendt, Le système totalitaire, Seuil, 2005, page 79
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- Article Agoravox copiant l'article du Monde du 30 mars 2008 [archive]
- Conspirationnisme [archive] - rr0.org de Jérôme Beau
- (en) The Blame Game [archive] - BBC News, 6 septembre 2005
- Beauvois, J.-L., Le Poultier, F., 1986. Norme d’internalité et pouvoir social en psychologie quotidienne. Psychologie française 31, 100–108.
- Areopagitica. Pour la liberté d'imprimer sans autorisation ni censure [archive], de John Milton (1644) vu par Cyril Lemieux, sociologue ; Le Monde des Livres du 3 janvier 2009, in la série d'articles Les livres qui ont changé le monde
- ISBN 0-8050-0568-4) Michael Baigent, Richard Leigh, Henry Lincoln, The Messianic Legacy. Henry Holt & Co (1987) (
- « Le complot du 11-Septembre n’aura pas lieu » [archive] Le Monde diplomatique, décembre 2006
- Jean-Bruno Renard, Les rumeurs négatrices, 2006 Revue Diogène, PUF [archive]
- ISBN 978-2-2640-3683-4) George Steiner, La Nostalgie de l'absolu, Editions 10/18, 2003, 88 pages (
- Cornell University Press, 2000. Empire of Conspiracy: The Culture of Paranoia in Postwar America, Ithaca,
- Biographie de Timothy Melley, Miami University [archive]
- Présentation de Empire of Conspiracy, 2000 [archive]
- Conspiracy theories (2008)
- Présentation de Conspiracy theories de Mark Fenster, University of Minnesota Press, 2008 [archive]
- Philosophe, politologue et historien des idées français qui a écrit plusieurs ouvrages sur le conspirationnisme : Les Protocoles des Sages de Sion : faux et usage d'un faux (nouvelle éd. refondue, 2004) ; Prêcheurs de haine. Traversée de la judéophobie planétaire (2004) ; La Foire aux « Illuminés ». Ésotérisme, théorie du complot, extrémisme (2005) ; et L'Imaginaire du complot mondial. Aspects d'un mythe moderne (2006), qui offre une synthèse des précédents.
- Carlo Guinzburg, Le sabbat des sorcières, Gallimard NRF, 2006
- ISBN 978-1-9040-4828-2) Voir par exemple The Knights Templar de Sean Martin, 2004 (
- (en) Conspiracy theories ; The hidden hand [archive] - The Economist, 19 février 2008
- David Ray Griffin, Steven E. Jones ou encore Webster G. Tarpley Voir par exemple
- (en) NASA debunks moon landing hoax conspiracy [archive] - CNN, 19 février 2001
- The American far-right's top 10 paranoid conspiracy theories [archive]
- Russian Scientists Accuse the U.S. of Provoking the Heatwaves Sweeping the Country Using Weather Weapons [archive]
- Antoine Vitkine et Barbara Necek, Le Grand complot, Arte, voir en ligne [archive]
- Total Recall We can remember it for you wholesale, qui inspira le film
Annexes[modifier]
Bibliographie[modifier]
- Pierre-André Taguieff, La foire aux illuminés : Ésotérisme, théorie du complot, extrémisme, 2005, Mille et une nuits, (ISBN 2-8420-5925-5)
- Pierre-André Taguieff, L’imaginaire du complot mondial, Aspects d’un mythe moderne, Paris, Mille et une nuits, 2006, (ISBN 2-8420-5980-8)
- Fredric Jameson, La Totalité comme complot : Conspiration et paranoïa dans l'imaginaire contemporain, Les Prairies Ordinaires, 2007.
- Jean Baudrillard, Simulacres et simulations, 1981 ; La Guerre du golfe n'a pas eu lieu, 1991 ; Le Complot de l'art, 1997.
- Raoul Girardet, Mythes et mythologies politiques, 1986, Seuil, (ISBN 2-0201-1484-4)
- Antoine Vitkine, Les Nouveaux Imposteurs, 2005, La Martinière, (ISBN 2-8467-5201-X)
- Massimo Introvigne, Les Illuminés et le Prieuré de Sion : La réalité derrière les complots du Da Vinci Code et Anges et Démons, Xenia Éditions, 2006, (ISBN 2-8889-2006-9), où il fait la différence entre micro-complot, complot de nature métaphysique et macro-complot.
- Frédéric Charpier, L'obsession du complot, 2005, Bourin Éditeur, 232 p, (ISBN 2-8494-1025-X)
- Véronique Campion-Vincent, La société parano, Payot, (ISBN 2-2289-0013-3)
- Jack Z. Bratich, Conspiracy Panics: Political Rationality and Popular Culture, State University of New York Press, 2008, 229 p.
- « Le Complot », Politica Hermetica, no 6 , 1992. Actes du VIIe colloque international, les 23 et 24 novembre 1991 à la Sorbonne, dans le cadre de l’École pratique des Hautes Études, présidé par Émile Poulat, EHESS et CNRS.
- Emmanuel Kreis, Les puissances de l'ombre. Juifs, francs-maçons, réactionnaires... la théorie du complot dans les textes., 2009, CNRS, (ISBN 978-2-271-06786-9)
Faux documents alimentant des théories du complot :
Articles connexes[modifier]
Liens externes[modifier]
- Conspiracy Watch - Observatoire du « conspirationnisme » et des théories du complot
- Dessin de presse paru dans Les Épées et Les Arts Plumitifs : la thèse du complot
- Un complot à la fois nécessaire et impossible : le 11 septembre 2001 - Partie 1 et Partie 2 - Une approche qui étudie les discours des tenants du complot
- L'invention de « la théorie du complot »; Ou les aveux de la sociologie libérale - Pièces et Main d'Œuvre, 20 avril 2007
- Conserveries Mémorielles -n°8 (2010)- L'imaginaire du complot: fonctions et archètypes -Philippe Münch La foule révolutionnaire, l’imaginaire du complot et la violence fondatrice : aux origines de la nation française (1789)[2]