Satellite artificiel - Partie 1

Satellite artificiel

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Le satellite de météorologie GOES O avant son lancement en orbite géostationnaire.

Un satellite artificiel est un objet fabriqué par l'homme, envoyé dans l'espace à l'aide d'un lanceur et gravitant autour d'une planète ou d'un satellite naturel comme la Lune. La vitesse imprimée par la fusée au satellite lui permet de se maintenir pratiquement indéfiniment dans l'espace en décrivant une orbite autour du corps céleste. Celle-ci, définie en fonction de la mission du satellite, peut prendre différentes formes — héliosynchrone, géostationnaire, elliptique, circulaire — et se situer à des altitudes plus ou moins élevées classifiées en orbite basse, moyenne ou haute.

Le premier satellite artificiel Spoutnik I est lancé par l'URSS en 1957. Depuis cette époque, plus de 5 500 satellites artificiels ont été placés en orbite (2007)[1],[N 1]. Les satellites jouent désormais un rôle important à la fois sur les plans économique (télécommunications, positionnement , prévision météorologique), militaire (renseignement) et scientifique (observation astronomique, microgravité, observation de la Terre, océanographie, altimétrie). Ils sont, en particulier, devenus des instruments incontournables pour notre compréhension de l'univers physique, la modélisation des changements climatiques et le fonctionnement de la société de l'information.

Un satellite artificiel est composé d'une charge utile, définie spécifiquement pour la mission qu'il doit remplir, et d'une plate-forme souvent standardisée assurant les fonctions de support comme la fourniture d'énergie, la propulsion, le contrôle thermique, le maintien de l'orientation et les communications. Le satellite est suivi par un centre de contrôle au sol, qui envoie des instructions et recueille les données collectées grâce à un réseau de stations terrestres. Pour remplir sa mission le satellite doit se maintenir sur une orbite de référence en orientant ses instruments de manière précise : des interventions sont nécessaires à intervalles réguliers pour corriger les perturbations naturelles de l'orbite générées, dans le cas d'un satellite terrestre, par les irrégularités du champ de gravité, l'influence du Soleil et de la Lune ainsi que la traînée créée par l'atmosphère qui subsiste en orbite basse.

Les progrès techniques permettent aujourd'hui de mettre en orbite des satellites plus lourds (jusqu'à 6 tonnes et demi pour les satellites de télécommunications), capables de remplir des missions toujours plus sophistiquées (satellites scientifiques), avec une grande autonomie. La durée de vie d'un satellite, variable selon le type de mission, peut atteindre 15 ans. Les avancées de l'électronique permettent également de concevoir des micro-satellites capables d'effectuer des missions élaborées.

La construction de satellites a donné naissance à une industrie très spécialisée mais les instruments les plus complexes sont encore souvent réalisés par des laboratoires de recherche. La conception d'un satellite, difficilement reproductible lorsqu'il ne s'agit pas d'un satellite de télécommunications, est un processus qui peut prendre une dizaine d'années dans le cas d'un satellite scientifique. Les coûts de fabrication qui peuvent monter à plusieurs centaines de millions d'euros et ceux de lancement (de l'ordre de 10 000 à 20 000 $/kg) limitent aujourd'hui le développement de cette activité qui, hormis le secteur des télécommunications très rentable pour les opérateurs, est subventionnée pour l'essentiel par les budgets publics.

Sommaire

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Principes physiques[modifier]

Mise en orbite[modifier]

Le « canon de Newton » : au-delà d'une certaine vitesse le boulet ne retombe plus au sol.

Un objet lancé à la surface de la Terre décrit une trajectoire parabolique qui le ramène au sol sous l'influence de la gravité terrestre (cas A sur le schéma). Plus la vitesse initiale de l'objet est importante plus le point de chute est éloigné (cas B). Lorsqu'une certaine vitesse est atteinte, l'objet chute mais sans jamais atteindre le sol du fait de la courbure de la Terre (cas C). Pour que l'objet conserve indéfiniment sa vitesse, il faut toutefois que celui-ci se déplace dans le vide au-dessus de l'atmosphère, là où aucune force de traînée (frottement) ne s'exerce : à cette altitude en application du principe d'inertie aucune énergie n'est en effet nécessaire pour maintenir son mouvement.

Pour qu'un objet soit satellisé autour de la Terre il faut que sa vitesse horizontale par rapport au centre la Terre (la vitesse d'injection) soit de 7 700 mètres par seconde pour une orbite circulaire à 200 km au-dessus de la Terre (au-dessous de cette altitude la traînée est trop importante). Si on communique une vitesse supérieure à un satellite circulant à la même altitude, l'orbite devient elliptique (cas D sur le schéma) : le point de l'ellipse le plus rapproché de la Terre est le périgée et le point le plus éloigné est l'apogée. Si la vitesse dépasse 11 km par seconde (cas E), le satellite échappe à l'attraction terrestre : c'est la vitesse de libération de la Terre qu'il est nécessaire de communiquer à une sonde spatiale pour qu'elle puisse être envoyée vers d'autres planètes du système solaire.

La vitesse de satellisation minimale est proportionnelle à la gravité - et donc à sa masse - du corps céleste autour duquel le satellite doit orbiter  : un objet qui décolle du sol lunaire a besoin d'une vitesse horizontale beaucoup plus faible pour être satellisé (4 fois plus faible que la Terre : 1,7 km/s).

Relation entre vitesse d'injection et orbite (apogée) pour un périgée fixé à 200 km[2]
Périgée
(km)
Vitesse d'injection
(km/seconde)
Remarque Apogée atteint
(km)
Type d'orbite
200 7,78 Vitesse minimale de satellisation 200 Basse (orbite circulaire)
200 8 1 000 Basse
200 9,2 10 000 Moyenne
200 10,2 36 000 Géosynchrone
200 10,8 380 000 Lune
200 11 Vitesse de libération infini interplanétaire

Les trois lois de Kepler[modifier]

Article détaillé : Lois de Kepler.
La Terre se trouve à l'emplacement d'un foyer de l'orbite elliptique du satellite dont la vitesse croit d'autant plus que la Terre est proche.

La trajectoire d'un satellite artificiel ou naturel est régie par les 3 lois formulées par Kepler s'appliquant au déplacement d'un objet gravitant autour d'un corps céleste :

  • loi I : l’orbite du satellite a la forme d’une ellipse dont un des deux foyers se trouve au centre du corps céleste (par exemple la Terre) autour duquel il gravite ; une orbite circulaire est un cas particulier de l’ellipse dont les deux foyers sont confondus au centre de la Terre. La forme de l'ellipse peut être définie par :
  • la distance rp du point de l'orbite le plus proche de la Terre (le périgée) au centre de la Terre,
  • la distance ra du point de l'orbite le plus éloigné de la Terre (l'apogée) au centre de la Terre,
On utilise généralement à la place :
  • le demi-axe a défini par la formule 2a = rp + ra,
  • l'excentricité e qui définit l'allongement de l'ellipse et peut être calculée par la formule e = 1-rp/a. Elle prend une valeur comprise entre 0 et 1 : 0 correspond à une orbite circulaire et plus la valeur est proche de 1 plus l'orbite est allongée ;
  • loi II : le satellite se déplace d’autant plus vite qu’il est proche du corps céleste ; plus précisément la droite qui joint le centre du corps céleste au satellite balaie toujours une aire égale dans un intervalle de temps donné ;
  • loi III : le carré de la période de rotation du satellite autour du corps céleste varie comme le cube de la longueur du grand axe de l’ellipse. Si l’orbite est circulaire, le grand axe est alors le rayon du cercle.

Période et vitesse orbitale d'un satellite artificiel terrestre[modifier]

Articles détaillés : période orbitale et vitesse orbitale.

Les lois de Kepler permettent de calculer à partir des caractéristiques de son orbite la période orbitale qui est l'intervalle de temps compris entre deux passages consécutifs d'un satellite par un point de son orbite, ainsi que la vitesse orbitale qui correspond à la vitesse du satellite par rapport au centre de la planète (le référentiel utilisé garde une orientation fixe dans l'espace) :

Type d'orbite
Type d'orbite Apogée Périgée Période Vitesse
apogée
Vitesse
périgée
Orbite basse
(GOCE)
270 km 270 km 90 ' 7,7 km/s 7,7 km/s
Orbite héliosynchrone
(Spot 1)
832 km 832 km 102' 7,4 km/s 7,4 km/s
Orbite de Molniya 39 900 km 500 km 12 h 1,49 km/s 10 km/s
Orbite géostationnaire 35 786 km 35 786 km 23h56' 3,1 km/s 3,1 km/s
Période orbitale P du satellite (en secondes) 
P=2pi sqrt frac{a^3}{mu}, avec  mu = 398 600,!4418 ;mbox{km}^{3} cdot mbox{s}^{-2} (Paramètre gravitationnel standard pour la Terre)
  • pour une orbite elliptique de 36 000 km sur 200 km le demi-axe a est égal à 24 478 km et la période P est d'environ 138 113 secondes ;
  • la formule fonctionne également pour une orbite circulaire a, étant alors remplacé par le rayon de l'orbite. Pour une orbite de 200 km le rayon est égal à 6 578 km (arrondi) ce qui donne une périodicité de 5 310 secondes soit environ 89 minutes ;
  • la période augmente au fur et à mesure que l'orbite s'élève.
  • un satellite en orbite géostationnaire, c'est-à-dire qui semble rester immobile à la verticale de l'équateur, a une période égale à 24 heures.
Vitesse à l'apogée et au périgée 
V_a = sqrt {mucdot left(frac{2}{r_{
m a}} - frac{1}{a}
ight) }
  • pour une orbite elliptique de 36 000 km sur 200 km, ra = 36 000 + 6 378 (rayon de la Terre) km et la formule permet de calculer que la vitesse à l'apogée est de 1,59 km/s ;
  • la formule est la même pour le périgée (on remplace ra par rp). On obtient dans le cas ci-dessus une vitesse de 10,24 km/s ;
  • pour une orbite circulaire la vitesse est constante (on remplace ra par le rayon de l'orbite). Pour une orbite de 200 km, la vitesse est égale à 7,784 km/s.
  • un satellite en orbite géostationnaire, c'est-à-dire qui semble rester immobile à la verticale de l'équateur, a une vitesse d'environ 3 km/s.
  • Il ne faut pas confondre cette vitesse avec celle qu'il est nécessaire d'imprimer au satellite pour atteindre son orbite : cette dernière est en partie transformée en énergie potentielle gravitationnelle.

Les paramètres de l'orbite d'un satellite[modifier]

Articles détaillés : Orbite et Orbitographie.
Paramètres orbitaux d'un satellite artificiel : ascension droite du nœud ascendant ☊, inclinaison i, argument du périgée ω.
Paramètres orbitaux : demi grand axe a, argument du périgée ω, anomalie vraie ν.

Six paramètres sont utilisés pour fournir la position et la trajectoire d'un satellite dans l'espace[3] :

  • l'orbite d'un satellite est un plan. Si on ne tient pas compte des perturbations naturelles auxquelles elle est soumise et en l'absence de manœuvres du satellite, le plan d'orbite est fixe dans l'espace. Ce plan peut être défini par deux paramètres : l'inclinaison i et la longitude (ou ascension droite) du nœud ascendant ☊ ;
  • trois paramètres – l'excentricité e et le demi-grand axe a de l'ellipse ainsi que l'argument du périgée ω – permettent de décrire la trajectoire en forme d'ellipse dans le plan d'orbite ;
  • un dernier paramètre permet de situer le satellite sur son orbite : on peut par exemple prendre le temps t écoulé depuis le passage au périgée.
Plans et droites de référence

Les paramètres de l'orbite sont définis dans un référentiel constitué de plusieurs plans et de droites :

  • la trajectoire de la Terre autour du Soleil s'inscrit dans un plan, dit plan de l'écliptique, passant par le centre du Soleil ;
  • le plan de l'équateur terrestre est le plan passant à la latitude de l'équateur ;
  • à l'équinoxe de printemps le 21 mars le plan de l'équateur terrestre coupe le plan de l'écliptique selon une ligne dite ligne des équinoxes passant par le Soleil. Cette droite qui désigne à l'infini le point vernal γ est fixe dans le système solaire ;
  • l'orbite d'un satellite coupe le plan de l'équateur en deux points appelés nœud ascendant lorsque le satellite passe de l'hémisphère sud à l'hémisphère nord et nœud descendant. La ligne reliant les deux points est appelée ligne des nœuds.
L'orientation du plan de l'orbite

L'inclinaison i du plan de l'orbite du satellite (entre 0 et 180 degrés) est l'angle que fait le plan de l'orbite avec le plan de l'équateur. Lorsque i = 90° l'orbite du satellite survole les pôles (orbite polaire) ; si i = 0 le plan de l'orbite se situe dans le plan de l'équateur. L'orbite est dite directe lorsque i est inférieur à 90° et rétrograde sinon.

La longitude du nœud ascendant (ou ascension droite du nœud ascendant) est l'angle entre la direction du point vernal et la ligne des nœuds, dans le plan de l'écliptique. Si le plan de l'orbite coïncide avec la droite des équinoxes la longitude du nœud ascendant est nulle.

Les caractéristiques de la trajectoire dans le plan d'orbite

Dans le plan défini par les paramètres précédents, l'orbite est décrite par trois paramètres. La forme de l'ellipse que parcourt le satellite est fournie par deux informations :

L'argument du périgée ω est l'angle formé par la ligne des nœuds et la direction du périgée (la droite passant par la Terre et le périgée de la trajectoire du satellite), dans le plan orbital. La longitude du périgée est la somme de la longitude du nœud ascendant et de l'argument du périgée.

La position du satellite sur son orbite

La position du satellite sur sa trajectoire peut être fournie de deux manières :

  • en spécifiant le temps t écoulé depuis son passage au périgée. t = 0 indique que le satellite est à son périgée ;
  • en indiquant l'angle ν (dit anomalie vraie) formé par les droites allant du centre de la Terre vers d'une part le périgée et d'autre part la position du satellite. ν = 0° indique que le satellite se trouve à son périgée.

Les perturbations naturelles de l'orbite[modifier]

Les satellites d'observation de la Terre comme Calipso utilisent la déformation de l'orbite engendrée par l'aplatissement du globe terrestre.

La trajectoire d'un satellite artificiel autour d'un corps céleste n'est pas complètement stable. Elle est modifiée par plusieurs phénomènes naturels dont l'influence est variable selon le corps céleste et la position du satellite. Si celui-ci tourne autour de la Terre, les phénomènes perturbateurs sont dans l'ordre décroissant d'influence :

L'aplatissement du corps céleste à ses pôles

La Terre n'a pas une forme parfaitement sphérique : ses pôles sont légèrement aplatis tandis l'équateur présente un renflement. Ces déformations induisent des modifications du plan de l’orbite. Ce mouvement, la précession nodale, est d'autant plus important que l'inclinaison de l'orbite est différente de 90° et proche de la Terre[4].

Cette perturbation, la plus importante que subit le satellite, modifie à la fois l'ascension droite du nœud ascendant ☊ et l'argument du périgée ω. Pour maintenir l'orbite, il est nécessaire de consommer beaucoup de carburant. Aussi les satellites en orbite basse, plutôt que de les corriger, soit exploitent les modifications d'orbite induites (satellite en orbite héliosynchrone) soit sont placés sur des orbites ayant des inclinaisons pour lesquels cette perturbation est nulle (i = 90° et 63° 26').

Les autres irrégularités du champ de gravité

Le champ de gravité terrestre présente d'autres irrégularités que celles dues aux déformations au pôle et à l'équateur : elles sont liées à des variations de densité (réplétions) du sous-sol terrestre (croûte et manteau). Celles-ci sont particulièrement nombreuses sur la Lune. Pour les satellites terrestres les variations du champ de gravité finissent par perturber l'orbite avec un ordre de grandeur beaucoup moins important que celui dû à l'aplatissement du globe terrestre.

La résistance de l'atmosphère

Si le corps céleste autour duquel gravite le satellite possède une atmosphère (Terre, Mars, Vénus) celle-ci exerce une force de traînée proportionnelle à la vitesse du satellite et à la densité de l'atmosphère : la vitesse du satellite est progressivement réduite. Si l'orbite est elliptique le premier effet de la résistance de l'atmosphère est de la rendre circulaire (l'apogée est modifiée et le périgée reste invariant) puis l'orbite circulaire est elle-même progressivement abaissée[5]. Le satellite finit par être détruit en rentrant dans les couches les plus denses de l'atmosphère. Dans le cas d'un satellite tournant autour de la Terre sur une orbite circulaire sa durée de vie moyenne est égale à (compte tenu de l'impact d'un vent solaire moyen détaillé plus loin) :

  • quelques jours pour une orbite de 200 km ;
  • quelques semaines à 300 km ;
  • quelques années à 600 km ;
  • un siècle à 800 km (c'est l'orbite des satellites de télédétection, comme la famille Spot) ;
  • plusieurs siècles à 1 000 km (ce sont les orbites des constellations des satellites de télécommunications, comme Globalstar et Iridium) ;
  • un million d'années à 36 000 km (ce sont les satellites géostationnaires, ou ceux qui ont terminé leur service opérationnel et ont été désorbités, vers une orbite de rebut).

L'orbite des satellites artificiels circulant sur une orbite basse est généralement maintenue au-dessus de 300 km pour que leur durée de vie ne soit pas trop brève. Pour certaines applications (satellite de renseignement, application scientifique), une orbite plus basse peut être choisie de manière temporaire ou permanente pour améliorer la précision de l'observation : le satellite doit alors emporter une grande quantité de carburant pour conserver cette orbite sinon sa durée de vie est particulièrement brève. Les satellites espions américains Keyhole 9 construits dans les années 1980 pouvaient ainsi descendre à une altitude de 118 km [N 2],[6]. On peut réduire la traînée des satellites orbitant à basse altitude en leur donnant une forme aérodynamique comme dans le cas du satellite GOCE qui, pour affiner notre connaissance du champ de gravité, parcourt une orbite circulaire de 250 km[7].

Le vent solaire, qui est un flux de plasma constitué essentiellement d'ions et d'électrons éjectés de la haute atmosphère du Soleil, peut augmenter temporairement la traînée. Ce flux varie en vitesse et en température au cours du temps en fonction de l'activité solaire. Celle-ci suit un cycle de 11 ans. Lors des éruptions solaires le réchauffement de l’ionosphère entraîne la dilatation vers le haut des couches supérieures de l'atmosphère. Entre 300 et 500 km la densité peut être multipliée par 10 [8]: la force de traînée augmente en proportion et certains satellites peuvent ainsi perdre plus de 10 km en quelques jours. Ces effets sont particulièrement gênants pour les satellites d’observation de la Terre tels que Spot, dont la position doit être connue avec une grande précision.

L'attraction de la Lune et du Soleil

Les deux astres ont une influence sur la trajectoire d'un satellite artificiel. Le Soleil malgré sa taille a une influence plus faible que la Lune du fait de son éloignement. La perturbation est d'autant plus forte que l'altitude de l'apogée est élevée : elle est nulle pour les satellites en orbite basse et faible pour les satellites géostationnaires.

La pression de radiation
Article détaillé : Pression de radiation.

Les photons émis par le Soleil exercent une pression faible — de l'ordre de 10-5 Pa autour de la Terre — mais continue sur les objets qu'ils rencontrent. La force exercée est proportionnelle à la surface exposée (l'incidence et le caractère réfléchissant de la surface exposée ont une incidence sur cette force).

Les différents types d'orbite des satellites artificiels terrestres[modifier]

Article détaillé : Liste d'orbites.
Le plan d'une orbite héliosynchrone présente toujours le même angle par rapport à la direction du Soleil.

Les orbites des satellites terrestres peuvent avoir de nombreuses formes et orientations : certaines sont circulaires ou au contraire en forme d'ellipse très allongée. Elles peuvent se situer à basse altitude juste au-dessus de l'atmosphère terrestre (250 km) ou dépasser 30 000 km. L'orbite d'un satellite artificiel est choisie pour répondre au mieux aux besoins de la mission. La plupart des satellites utilisent un des quatre types d'orbite suivants[9] :

  • l’orbite géostationnaire (ou de Clarke) est une orbite circulaire située dans le plan de l'équateur à une altitude de 35 786 km du sol (le rayon de l'orbite est donc de 42 164 km). À cette altitude la période de révolution du satellite correspond exactement à la période de rotation de la Terre, soit 23 heures, 56 minutes et 4 secondes. Vu de la Terre, un satellite géostationnaire semble immobile dans le ciel : c’est l’orbite parfaite pour les satellites de télécommunications et pour certains satellites d’observation (météo) qui doivent couvrir une zone fixe. Trois satellites géostationnaires suffisent pour l'ensemble de la surface du globe terrestre. La mise à poste d'un satellite géostationnaire nécessite, du fait de l'altitude, un lanceur puissant. Pour les télécommunications la distance franchie par un signal transitant par ce type de satellite crée un délai perceptible par un usager. Les satellites de télécommunications qui ne suivent pas ce type d'orbite sont appelés satellites à défilement ;
  • l’orbite polaire est une orbite circulaire basse (par convention entre 300 et 1 000 km d’altitude) dont l'inclinaison, proche de 90°, la fait passer au-dessus ou près des pôles. Un satellite situé sur une orbite polaire passe régulièrement au-dessus de tous les points de la surface grâce à la rotation de la Terre. Les orbites polaires sont généralement des orbites héliosynchrones : ce type d'orbite conserve un angle constant avec la direction Terre-Soleil c'est-à-dire que le plan d'orbite tourne de 360° par an. Les orbites héliosynchrones permettent de passer toujours à la même heure solaire locale au-dessus d'un lieu donné : l'éclairage identique des prises de photo du lieu permet de faire ressortir les changements. Cette caractéristique en fait une orbite idéale pour des satellites d’observation de la Terre. La rotation du plan d'orbite se fait naturellement en utilisant les perturbations de l'orbite générées par l'aplatissement du globe terrestre. L'orbite midi/minuit est un cas particulier d'orbite héliosynchrone où l'heure solaire fixe de passage est aux environs de midi ou minuit pour les longitudes équatoriales. L'orbite crépusculaire, d'une manière similaire, est une orbite héliosynchrone dont l'heure solaire fixe de passage coïncide avec le lever ou le coucher du Soleil ;
Les catégories d'orbite selon l'altitude (schéma à l'échelle).
Les cinq points de Lagrange du système Terre-Soleil.
Traces au sol d'une orbite héliosynchrone et d'une orbite Molnyia sur 24 heures.
  • l'orbite basse se situe juste au-dessus de l'atmosphère terrestre à une altitude où la traînée ne freine pas trop la vitesse du satellite (par convention l'orbite basse se situe à une altitude inférieure à 2 000 km). Une fusée a besoin de moins de puissance pour placer un satellite sur ce type d'orbite. Elle est utilisée par les satellites scientifiques qui explorent l'espace lointain. Le télescope Hubble, par exemple se situe sur une orbite de 610 km. On trouve également sur ce type d'orbite les satellites de radioamateur et les constellations de téléphonie mobile ou de télédétection terrestre, telle que l'A-train ;
  • l'orbite moyenne culmine généralement à une altitude de 20 000 km avec une période de 12 heures. L'orbite située en dehors de l'atmosphère terrestre est très stable. Les signaux envoyés par le satellite peuvent être reçus sur une grande partie de la surface du globe terrestre. C'est l'altitude retenue pour les satellites de navigation comme le système GPS. Un peu plus bas, à 8.063 km, est prévue la constellation de satellites O3b pour la distribution d'Internet.
  • L'orbite haute a un apogée qui se situe à une altitude supérieure à l'orbite géostationnaire. La Russie utilise ce type d'orbite pour certains de ses satellites de télécommunications : l'orbite de Molniya se caractérise par une orbite très excentrique avec un apogée de 40 000 km pour un périgée de 500 km. L’inclinaison de 63,4° permet d'échapper aux perturbations d'orbite découlant de l'aplatissement du globe. L'orbite de Molniya permet une couverture 24h sur 24 du territoire de la Russie avec une constellation de trois satellites. Cette orbite est utilisée car la Russie ne peut lancer de satellites géostationnaires depuis ses bases spatiales toutes situées à des latitudes trop élevées et les satellites géostationnaires ne peuvent pas couvrir la fraction du territoire russe située à une latitude supérieure à 81°[10].
  • Les orbites autour des points de Lagrange constituent une catégorie à part. Un point de Lagrange est une position de l'espace où les champs de gravité de deux corps célestes se combinent de manière à fournir un point d'équilibre à un troisième corps de masse négligeable, tel que les positions relatives des trois corps soient fixes. Le système Terre-Soleil dispose de 5 points de Lagrange dont 2 (L1 et L2) se trouvent à relativement faible distance de la Terre (1,5 million de kilomètres). Un satellite positionné à un de ces points a besoin de très peu d'énergie pour se maintenir à poste et contrôler son orientation. L2, situé à l'opposé du Soleil par rapport à la Terre, permet d'observer les étoiles lointaines sans être perturbé par une lumière parasite[11]. Plusieurs télescopes spatiaux ont été ou vont être positionnés près de L2 dont Planck et Herschel en 2009, Gaia en 2011 et le James Webb Space Telescope en 2013.

La trace au sol[modifier]

La trace au sol d'un satellite est la projection au sol de sa trajectoire selon une verticale qui passe par le centre du corps céleste autour duquel il tourne. Sa forme détermine les portions de surface balayées par les instruments du satellite et les créneaux de visibilité du satellite par les stations terrestres.

Le dessin de la trace résulte à la fois du déplacement du satellite sur son orbite et de la rotation de la Terre. Cette dernière entraîne une déformation vers l'ouest de la trace par rapport à la trajectoire[12] :

  • lorsque l'orbite est circulaire, la déformation est d'autant plus forte que l'orbite est haute. Dans le cas particulier d'un satellite géostationnaire la trace se réduit à un point ;
  • un satellite non géostationnaire dont l'orbite est circulaire et parallèle à l'équateur (inclinaison=0°) aurait une trace droite dont la longueur dépend de son altitude ;
  • lorsque l'orbite est elliptique la trace est particulièrement décalée si le satellite est proche de son périgée. La déformation diminue lorsque le satellite survole des latitudes élevées pour devenir nulle s'il survole les pôles (vitesse de rotation de la Terre nulle en ce lieu) ;
  • l'inclinaison i de l'orbite détermine les latitudes entre lesquelles évolue la trace : plus l'inclinaison est forte plus les latitudes balayées par la trace sont importantes ;
  • un satellite dont l'orbite est directe recoupe des méridiens de plus en plus orientaux si la composante est-ouest de sa vitesse angulaire est supérieure à 15° 2' 30' et dans le cas inverse (orbite rétrograde) recoupe des méridiens de plus en plus occidentaux ;
  • dans le cas des satellites d'observation héliosynchrones ce décalage de la trace joue un rôle important dans la prise d'images, puisqu'il est souvent demandé à ces satellites d'observer le même lieu à des intervalles rapprochés. La fréquence de passage au-dessus d'un point du globe est donc une caractéristique de l'orbite du satellite. Les satellites Spot balayent ainsi les mêmes lieux tous les cinq jours.

Historique[modifier]

Les précurseurs[modifier]

La première mention d'un satellite artificiel figure dans la nouvelle The Brick Moon de Edward Everett Hale (1869). Jules Verne évoque également cette idée dans Les 500 millions de la Bégum (1879). En 1903, Constantin Tsiolkovsky (1857–1935) publie Исследование мировых пространств реактивными приборами (« Exploration de l'espace au moyen d'engins à réaction »), qui constitue le premier ouvrage scientifique sur l'utilisation de fusées pour le lancement des engins spatiaux. Dans cet ouvrage il indique la vitesse minimale que doit atteindre un objet pour qu'il se place en orbite autour de la Terre (8 km/s) et préconise l'utilisation d'une fusée à plusieurs étages avec des moteurs à propergols liquides.

En 1928, le Slovène Herman Potočnik (1892–1929) dans son unique ouvrage Das Problem der Befahrung des Weltraums (« La Problématique du vol spatial ») décrit les moyens à mettre en œuvre pour permettre à l'homme de s'établir de manière permanente dans l'espace. Il décrit comment des vaisseaux spatiaux placés en orbite peuvent être utilisés pour des observations pacifiques et militaires de la surface de la Terre ; il montre l'intérêt de l'apesanteur pour les expériences scientifiques. Le livre décrit le fonctionnement des satellites géostationnaires (évoqués pour la première fois par Tsiolkovsky) et explore le problème des communications entre le sol et les satellites par le biais de la radio. Mais l'ouvrage n'évoque jamais l'utilisation des satellites pour relayer les télécommunications et comme système de radiodiffusion.

En 1945, l'écrivain de science-fiction Arthur C. Clarke (1917-2008) décrit en détail l'utilisation de satellites de télécommunications pour les communications de masse. Clarke passe en revue les contraintes logistiques d'un lancement de satellite, les orbites possibles ainsi que d'autres aspects permettant la création d'un réseau de satellites couvrant le globe en mettant en avant les avantages de disposer d'un système de télécommunications planétaire. Il suggère également l'utilisation de trois satellites en orbite géostationnaire, nombre suffisant pour couvrir l'ensemble de la planète.

Les premiers satellites[modifier]

Spoutnik 1 le premier satellite artificiel (1957).

Le premier satellite artificiel Spoutnik I est lancé par l'URSS le 4 octobre 1957 et constitue le point de départ de la course à l'espace entre l'URSS et les États-Unis. Spoutnik 2, lancé le 3 novembre 1957 place en orbite pour la première fois une créature vivante, la chienne Laïka. Les États-Unis, dont le programme spatial avait pris du retard, placent en orbite leur premier satellite (Explorer I) le 31 janvier 1958. En juin 1961, 3 ans et demi après Spoutnik 1, l'US Air Force détectait près de 115 satellites en orbite autour de la Terre. Les premiers satellites sont utilisés pour des études scientifiques. Les variations de l'orbite de Spoutnik 1 permettent de mieux connaître la densité des couches atmosphériques supérieures.

Premier satellite mis en orbite par un lanceur national
Pays Année du
lancement
Premier satellite
Drapeau de l'URSS URSS 1957 Spoutnik 1 (compagnon)
Drapeau des États-Unis États-Unis 1958 Explorer 1 (explorateur)
Drapeau de la France France 1965 Astérix (personnage de Bande Dessinée)
Drapeau du Japon Japon 1970 Ōsumi (nom d'une province japonaise)
Drapeau de la République populaire de Chine Chine 1970 Dong Fang Hong I (Orient rouge)
Drapeau du Royaume-Uni Royaume-Uni 1971 Prospero X-3 (personnage de Shakespeare)
Inde Inde 1980 Rohini (personnage de la mythologie hindoue)
Israël Israël 1988 Ofeq 1 (horizon)
Drapeau de Iran Iran 2009 Omid 1 (espoir)

La multiplication des domaines d'application[modifier]

Telstar 1, premier satellite de communication (1962).
Mariner 9 en se plaçant en orbite autour de Mars est le premier satellite artificiel à orbiter autour d'un autre corps céleste que la Terre (1971).

Les satellites d'observation militaire apparaissent dès le début de la conquête spatiale : ce sont les satellites américains de la série Corona (premier lancement en juin 1959) qui permettent d'observer les installations militaires russes que les batteries anti-aériennes protègent de mieux en mieux des avions espions. Très complexes (les photos prises sont envoyées sur Terre dans une capsule qui doit être récupérée en vol), il ne faudra pas moins de 20 lancements avant d'obtenir le premier vol réussi[13]. Le premier satellite d'alerte avancée destiné à détecter le lancement d'un missile stratégique est le Midas américain dont le premier vol réussi remonte à mai 1960[14].

TIROS-1, lancé le 1er avril 1960, inaugure les satellites destinés à l'observation météorologique. Le satellite américain Landsat-1, lancé le 23 juillet 1972, est le premier satellite dédié à l'observation de la Terre et plus particulièrement à l'évaluation des récoltes céréalières[15]. Le satellite GEOS-3 lancé le 9 avril 1975 inaugure l'utilisation d'un radar depuis l'espace[16]. Lancé le 30 mai 1971, le satellite Mariner 9 est le premier satellite mis en orbite autour d'une autre planète (Mars)[17]. Le télescope spatial Hubble, lancé en 1990, est le premier observatoire de cette dimension mis en orbite.

Les satellites de télécommunications première application commerciale[modifier]

En 1960, le premier satellite de télécommunications Echo est placé en orbite basse. C'est un satellite passif qui se contente de renvoyer les signaux contrairement à Telstar 1 mis en orbite 1962 qui les amplifie : pour recevoir le signal de ce dernier il faut malgré tout une antenne de plusieurs dizaines de mètres. À l'époque, seuls les États-Unis maîtrisent la technologie permettant de créer un système de télécommunications spatial. L'organisation Intelsat est mise en place pour rentabiliser l'investissement américain en faisant bénéficier ses adhérents de la prestation américaine en échange de leur contribution. Le satellite Early Bird (1965), lancé pour le compte d'Intelsat, est le premier satellite de télécommunications placé en orbite géostationnaire. La capacité des satellites de télécommunications, limitée initialement à 300 circuits téléphoniques va augmenter en profitant des progrès de l'électronique pour atteindre 200 000 circuits à la fin du XXe siècle.

Les satellites Symphonie (1974-1975)[18], fruits d'une coopération franco-allemande, sont les premiers satellites de télécommunications réalisés en Europe. Plusieurs innovations sont introduites : la stabilisation trois-axes en orbite géostationnaire et le recours à un système de propulsion biergol pour la manœuvre de circularisation géosynchrone et le maintien à poste.

Des opérateurs internationaux (Inmarsat dédié aux communications maritimes, Interspoutnik pour les pays de l'Est), régionaux (Eutelsat opérateur européen, Arabsat…), nationaux et privés (Astra) sont créés dans les années 1970-1980 pour mutualiser les moyens nécessaires à la mise en place de réseau de satellites dédiés tandis qu'Intelsat assure une couverture mondiale. La Russie handicapée à la fois par la latitude de ses bases de lancement et celle d'une grande partie du pays n'adopte pas le système des satellites géostationnaires qui s'est généralisé mais met en place un système reposant sur des satellites en orbite moyenne fortement elliptique. Dans les années 1990-2000 la rentabilité de l'activité, qui s'est diversifiée (télévision directe, Internet, messagerie), s'accroît fortement : en conséquence les organisations internationales (Intelsat) et régionales (Eutelsat) sont progressivement privatisées tandis que les opérateurs privés se multiplient. L'activité fait partie des secteurs les plus touchés par la bulle Internet de la fin des années 1990 : plusieurs opérateurs mettent en place des projets de constellations (de 10 à 70 satellites) en orbite basse (Iridium, Globalstar, …) pour lancer entre autres la téléphonie par satellite. Mais la rentabilité n'est pas au rendez-vous et les projets sont arrêtés ou leurs objectifs sont revus à la baisse. Les trois quart des revenus proviennent aujourd'hui de la télévision par satellite en pleine expansion sur tous les continents[19].



14/08/2011
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