Projet Orion : conception d'un véhicule spatial mû par propulsion nucléaire pulsée

 

Projet Orion

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Vue d'artiste d'un vaisseau Orion selon les principes de conception de la NASA.
Vue d'artiste d'un vaisseau Orion selon les principes de conception de la NASA.
Cet article concerne le projet de propulsion spatiale des années 1960.
Pour le projet homonyme de balai laser, voir Balai Laser.
En 2006, la NASA a décidé de réutiliser la désignation Orion pour son concept de nouveau vaisseau habité d'exploration spatiale, précédemment appelé Crew Exploration Vehicle.

Le Projet Orion était la première étude de conception d'un véhicule spatial mû par propulsion nucléaire pulsée, idée proposée par Stanislaw Ulam en 1947. Le projet initié dans les années 1950, était mené par une équipe d'ingénieurs et de physiciens de General Atomics, comprenant quelques célébrités telles que le physicien Theodore Taylor. Sur la demande de Taylor, le physicien et romancier Freeman Dyson quitta pendant une année ses travaux universitaires en Angleterre pour diriger le projet. Ce fut le premier groupe de réflexion de la sorte depuis le projet Manhattan, la plupart des membres du projet Orion déclarent s'en souvenir comme les meilleures années de leur vie. À de nombreux égards, l'humanité n'a jamais été aussi près qu'alors des voyages spatiaux à grande échelle.

En se basant sur l'énergie nucléaire, Orion permettait d'obtenir à la fois une forte poussée et une importante impulsion spécifique, le Graal de la propulsion spatiale. Les performances offertes dépassaient de loin celles des meilleures fusées conventionnelles ou nucléaires alors à l'étude. L'objectif était de permettre les voyages interplanétaires à bas coût. Ses partisans en ressentaient les forts potentiels, mais le projet perdit son soutien politique à cause des inquiétudes au sujet des contaminations provoquées par la propulsion. Le traité d'interdiction partielle des essais nucléaires de 1963 est considéré comme le coup de grâce asséné au projet.

Sommaire

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Contexte [modifier]

Stanislaw Ulam et Cornelius Everett comprirent que les explosions atomiques ne pouvaient être confinées dans une chambre de combustion. De tels projets avaient brièvement existé[1], mais leurs performances théoriques étaient si faibles qu'ils ne dépassèrent jamais le stade de la table à dessin.

En 1954, au cours de la série d'essais nucléaires opération Castle dans le Pacifique, une expérience conçue par Lew Allen prouva indirectement que les explosions nucléaires pouvaient être utilisées comme moyen de propulsion. Deux sphères d'acier revêtues de graphite et contenant des matériaux à irradier étaient suspendues à proximité de la charge testée. Après l'explosion, les deux sphères furent retrouvées plus loin et intactes, démontrant qu'une structure bien conçue pouvait résister au feu nucléaire. Cette expérience fut renouvelée plusieurs fois dans l'opération Teapot dans le désert du Nevada.

La campagne d'essais nucléaires opération Plumbbob permit de revérifier accidentellement la validité du principe lors du tir Pascal B du 27 août 1957[2]. L'explosion confinée de la charge de faible puissance a provoqué l'éjection d'une trappe en acier de 900 kg, à six fois la vitesse de libération d'après les calculs du Dr. Brownlee, responsable de test[3]. La plaque ne fut évidemment jamais retrouvée, mais elle ne fut pas non plus le premier objet lancé par l'homme dans l'espace car il est certain qu'elle fut vaporisée par friction dans l'atmosphère.

Conception [modifier]

Conception globale du véhicule
Conception globale du véhicule

Au lieu d'une configuration chambre de combustion / tuyère, le concept d'Orion était d'éjecter des charges à fission ou à fusion à l'arrière du véhicule et de les faire exploser à 60 m (200 ft), récupérant le souffle sur une épaisse plaque de poussée en acier ou aluminium. D'énormes amortisseurs étagés devaient absorber l'onde de choc du plasma frappant la plaque de poussée, transformant les 50 000 g subis par la plaque pendant une milliseconde en une poussée constante.

Énergie nucléaire [modifier]

Le propergol d'Orion pouvait être solidaire de la charge nucléaire ou largué entre la bombe et la plaque. Des masses de polyéthylène aussi bien que les détritus étaient considérés comme utilisables pour transmettre une poussée.

Conception d'une unité de propulsion Orion
Conception d'une unité de propulsion Orion

Intégrée à la bombe, la forme de la masse propulsive est primordiale pour l'efficacité. L'explosion d'une bombe au cœur d'une masse cylindrique s'expand en une vague de plasma plate en forme de disque. Une bombe accolée à une masse en forme de disque engendre une vague bien plus efficace en forme de cigare qui se concentre mieux sur la plaque de poussée.

La version originale du projet prévoyait une masse accolée à une bombe dont les matériaux et la géométrie focalisaient les rayons X et le plasma du cœur de l'explosif sur cette masse. La bombe classique était entourée d'un réflecteur de radiations tubulaire en uranium rempli d'un "mastic" d'oxyde de béryllium. Ce tube était ouvert à une de ses extrémités où était accolé le disque de tungstène constituant la masse propulsive. Le tout était conditionné dans un emballage permettant sa manipulation automatique par un dispositif ressemblant à un gros distributeur de canettes de boisson. Le rôle du mastic dans la cavité réflectrice est de transformer le flash de rayons X en chaleur (ce que le tungstène ne fait pas aussi bien que le BeO) et en onde de choc transmise à la masse de tungstène. Accessoirement, cette disposition protège en partie le véhicule des rayonnements gamma et neutroniques émis par l'explosion.

Les performances dépendent de la vitesse des gaz éjectés, afin de maximiser la poussée exercée sur la fusée par une masse donnée. La vitesse du plasma résultant de l'explosion est proportionnelle à la racine carrée de la température (Tc) de la boule de feu atomique. Comme cette température atteint généralement au moins 10 millions de degrés en moins d'une milliseconde, elle engendre une très grande vitesse de plasma. Néanmoins, la conception pratique doit également limiter le rayon de la zone destructive de l'explosion, ce rayon étant proportionnel à la racine carrée de la puissance de la bombe.

Une explosion atomique de 10 kilotonnes engendrerait une vitesse de plasma d'environ 100 000 m/s et une zone destructive de seulement 100 m de diamètre. Une bombe d'une mégatonne produirait une vitesse de 10 000 000 m/s mais le diamètre de la boule de feu serait de 1 000 m.

Une microseconde après l'allumage de la bombe, le rayonnement, le plasma et les neutrons générés sont à peu près contenus par l'enveloppe réflectrice en uranium et chauffent le mastic. Au bout de 2 - 3 microsecondes, le mastic transmet l'onde de choc à la masse propulsive qui se vaporise et forme une vague de plasma allongée et dirigée vers la plaque de poussée.

Au bout de 300 microsecondes, le plasma s'est refroidit jusqu'à 14 000 °C en franchissant la distance qui le sépare de la plaque de poussée, puis se réchauffe jusqu'à 67 000 °C en se comprimant contre elle. Ce regain de température entraîne une forte émission d'ultraviolets qui n'est pas interceptée par le plasma environnant, ce qui permet de ne pas surchauffer la plaque. La forme de la vague en cigare et sa faible densité limitent le choc que la plaque subit.

Distribution [modifier]

Le module de propulsion comprend un magasin distributeur de bombes qui sont insérées dans un canon pneumatique. Ce canon lance les unités à travers un trou de la plaque de poussée avec un intervalle de 0,8 à 1,5 secondes et à une vitesse d'environ 130 m/s. L'unité reste désarmée tant qu'elle n'a pas franchi la distance de sécurité avec le véhicule, puis une fois armée, l'explosion est commandée par un signal du véhicule quand toutes les conditions de synchronisation entre les éléments sont satisfaisantes.

Le magasin distributeur contient 900 bombes, ce qui est largement suffisant pour une manœuvre mais pas forcément pour l'ensemble de la mission. Il est donc prévu de pouvoir le recharger à partir de containers externes largables.

Plaque de poussée [modifier]

L'épaisseur de la plaque varie d'un facteur de 6 entre son centre et sa périphérie afin que la vague de plasma, qui transfère plus de quantité de mouvement en son centre, imprime la même vélocité sur toutes les parties de la plaque.

L'exposition à des détonations nucléaires répétées menace la plaque de poussée d'ablation. Cependant, les calculs et les expérimentations montrent qu'une plaque d'acier sans protection s'éroderait de moins d'1 mm. Pelliculée d'huile graphitique, elle ne s'érode presque plus (cette découverte accidentelle a été faite avec une plaque testée sur laquelle il restait une empreinte digitale n'ayant pas souffert d'ablation). Le spectre d'absorption du carbone et de l'hydrogène minimise l'échauffement. Le système d'aspersion d'huile est intégré au tube central d'éjection des unités de propulsion.

L'onde de choc atteint la température de 67 000 °C, émettant alors des ultraviolets. La plupart des éléments sont opaques à ce rayonnement, d'autant plus à la pression de 340 MPa qui existe au niveau de la plaque. Cela lui évite de fondre ou de s'éroder.

Un problème qui resta irrésolu à la fin du projet était de déterminer si la turbulence créée par la combinaison du plasma propulsif et de l'ablation de la plaque pourrait gravement augmenter l'ablation ultérieure de la plaque. D'après Dyson dans les années 1960, il aurait fallu le tester avec de vraies explosions nucléaires pour le savoir ; avec les techniques modernes de simulation, cela pourrait être étudié plus finement et sans recourir à cette méthode empirique.

Un autre problème potentiel tient aux épaufrures — échardes métalliques arrachées aux bords de la plaque.

Amortisseurs [modifier]

La première version de l'amortisseur était de simples ballons toroïdaux concentriques et étagés. Cependant, en cas d'échec d'une des explosions, les 1 000 t de la plaque les auraient déchirés après son rebond non limité par l'explosion ratée. C'est pourquoi il a été adopté un système à deux étages possédant des fréquences propres différentes afin d'éviter les phénomènes de résonance.

L'amortisseur primaire pneumatique devait avoir une fréquence propre égale à 4,5 fois celle des détonations. L'amortisseur secondaire mécanique, de grand débattement, devait osciller à une fréquence moitié de celle des explosions, cela permettait à la plaque de poussée d'être en position idéale à l'explosion suivante, même en cas de tir raté.

Les longues tiges des pistons amortisseurs secondaires s'avérèrent les plus difficiles à concevoir, bien que le problème n'ait pas été considéré insoluble.

Charge utile [modifier]

Poste de pilotage / véhicule d'évasion d'un Orion pour 8 passagersLes pointillés indiquent l'emplacement des coursives de passage vers le reste du véhicule
Poste de pilotage / véhicule d'évasion d'un Orion pour 8 passagers
Les pointillés indiquent l'emplacement des coursives de passage vers le reste du véhicule

Dans le cas de missions pilotées, il est nécessaire de prévoir une zone de l'habitacle protégée des radiations du moteur en fonctionnement, comprenant donc le poste de pilotage. Ce refuge serait également utilisé en cas d'éruption solaire. Le reste de l'habitacle n'est protégé qu'envers le rayonnement ambiant du milieu interplanétaire. L'objectif est qu'au cours d'une mission, l'équipage ne subisse pas plus de 50 rem de la part du moteur et 50 rem du milieu spatial.

La stratégie adoptée consiste à situer ce poste de pilotage / refuge dans le véhicule de secours. Son blindage contre les radiations solaires serait uniforme tandis que le blindage supplémentaire vis-à-vis de la propulsion, placé uniquement sur le "bas" du refuge, serait en grande partie constitué par le carburant de secours. Le reste du véhicule de secours n'a pas besoin de protection importante, cela concerne le poste de navigation et les réserves logistiques (seulement 15 jours de réserves sont nécessaires au sein du refuge).

Cette conception impose que les passages entre le poste de commande et le reste du vaisseau se fasse par les cotés du véhicule. Les autres modules sont consacrés au déroulement normal de la mission (laboratoires, véhicules d'exploration, gymnase, mess, atelier, magasins de pièces de rechange, ...).

Performances [modifier]

L'impulsion spécifique brute, ne concernant que l'unité de propulsion, est calculée à partir de la quantité de mouvement transmise par le plasma remplissant l'angle solide αe ayant pour sommet le point d'ignition et pour base la plaque de poussée (la tangente de cet angle est donc distance de mise à feu / rayon de la plaque). Cette impulsion est définie par:

I_{brute} = {M_{{\alpha}_e} \over M_{unit \acute e}} \cdot {V_{{\alpha}_e} \over g}

Mαe est la masse de plasma propulsé dans l'angle αe, Vαe est la vitesse moyenne perpendiculaire à la plaque du plasma contenu dans l'angle αe, et M_{unit \acute e} la masse de l'unité de propulsion.

L'impulsion spécifique réelle du système de propulsion est obtenue en appliquant à cette impulsion brute un terme correcteur ε prenant en compte la quantité d'huile anti-ablation, de gaz du canon pneumatique, des divers autres fluides consommés par tir, la proportion de tirs ratés et la précision des tirs réussis:

I_{sp} = {I_{brute} \over (1+\epsilon)}

Les différentes configurations de véhicule Orion donnent toutes un ε aux alentours de 0,2. Ce terme représentatif du fonctionnement nominal ne prend pas compte les dépenses à l'initialisation et à l'extinction du système de propulsion (200 à 800 kg de fluides et matériel), qui sont à peu près compensables par l'explosion d'une unité supplémentaire.

Les études pratiques les plus abouties donnent des impulsions de 1850 à 3150 s. En théorie, le facteur limitant l'Isp est l'ablation de la plaque qui impose une limite pour la vitesse du plasma d'environ 200 km/s, soit avec l'efficacité atteinte une impulsion de 10 000 s. Toutefois, ces valeurs pratiques et cette limite supérieure (datant de 1964) étaient supposées améliorables par divers développements technologiques, on pensait alors que les véhicules des années 1980 auraient des impulsions de 10 000 à 20 000 s.

Tailles de vaisseaux Orion [modifier]

Un rapport de 1959 de General Atomics[4] exposait les caractéristiques de trois vaisseaux Orion envisageables.

"satellite"
Orion
"midrange"
Orion
"super"
Orion
Diamètre du vaisseau 17-20 m 40 m 400 m
Masse du vaisseau 300 t 1-2 000 t 8 000 000 t
Nombre de bombes 540 1 080 1 080
Masse de chaque bombe 0,22 t 0,37-0,75 t 3,00 t

La configuration maximale, le "super" Orion, avec ses 8 millions de tonnes pourrait facilement abriter une petite ville. Au cours d'entretiens, les concepteurs envisageaient ce vaisseau comme une possible arche interstellaire. Ce projet le plus ambitieux pouvait être réalisé avec les matériaux et techniques de 1958 ou pressentis comme imminemment disponibles. Avec ceux d'aujourd'hui, le dimensionnement maximal pourrait encore être augmenté.

Les 3 t de chaque unité de propulsion du "super" Orion seraient en fait composées essentiellement de matériau inerte, tel que du polyéthylène ou des sels de bore, servant à transmettre la poussée sur la plaque et à absorber les neutrons pour minimiser la contamination. Un concept de "super" Orion proposé par Freeman Dyson était doté d'une plaque de poussée composée initialement d'uranium ou d'un élément transuranien, afin que cette plaque activée par le bombardement de neutrons puisse être convertie en combustible nucléaire une fois le vaisseau arrivé à sa destination interstellaire.

Diamètre 10 m 20 m
Isp 1850 s 3150 s
Poussée 3,5 MN 16 MN
Masse sèche 91 t 358 t
Masse bombe 141 kg 450 kg
Période de tir 0,86 s 0,87 s
Capacité magasin 900 900
Magasin externe 92 163

Finalement, l'étude de 1964 visant des applications plus immédiates, ne devait retenir que deux dimensionnements de base: un modèle de 10 m de diamètre montable sur les premiers étages des fusées Saturn et un de 20 m similaire au précédent à ceci près qu'il possèdait deux groupes d'amortisseurs secondaires concentriques.

Les caractéristiques de ces modules de propulsion sont données dans la table ci-contre. La masse sèche correspond à un module sans aucun magasin externe et sans structure supérieure (fixation des magasins externes et de la charge utile).

Applications [modifier]

Le concept de propulsion du projet Orion est extrêmement performant. Les vaisseaux utilisant des unités de propulsion à fission était prévus pour les trajets interplanétaire et ceux à fusion pour les voyages interstellaires.

Les missions impliquant un véhicule de type Orion comprenaient originalement des allers-retours mono-étage (directement depuis la surface terrestre) vers Mars, et des voyages vers les lunes de Saturne.

La vitesse de croisière atteinte par un vaisseau Orion thermonucléaire est de 8 à 10 % de la vitesse de la lumière (0,08 à 0,1 c). Un vaisseau à fission aurait peut-être pu atteindre 3 à 5 % de la vitesse de la lumière.

Même à 0,1 c, un vaisseau Orion thermonucléaire mettrait 44 ans pour atteindre Proxima Centauri, notre plus proche étoile voisine. L'astronome Carl Sagan suggéra que ce serait un excellent moyen de se débarrasser de nos arsenaux nucléaires.

Une des applications modernes envisageables avec cette technologie serait la déviation d'un objet géocroiseur. Les hautes performances du principe autoriseraient même une réaction tardive, le véhicule lancé aurait suffisamment d'énergie cinétique pour dévier l'objet simplement par impact. De plus, une mission automatique serait affranchie de l'aspect de conception le plus problématique: les amortisseurs.

La première amélioration du concept Orion fut proposée en 1978 par la British Interplanetary Society. Le projet Daedalus était une sonde interstellaire automatique vers l'étoile de Barnard qui aurait atteint 12 % de la vitesse de lumière grâce à un système de propulsion basé sur la fusion explosive de pastilles de deutérium ou tritium déclenché par confinement inertiel. Ceci permettait d'envisager des explosions plus petites et donc un système amortisseur plus léger.

En 1989, l'US Navy améliorait encore Daedalus avec son projet Longshot.

Depuis 1998, le département d'ingénierie nucléaire de l'université de la Pennsylvanie a développé deux versions améliorées de Daedalus : le projet ICAN et le projet Aimstar [5].

Un modèle réduit baptisé putt-putt et utilisant des explosifs chimiques RDX, effectua un vol de 23 secondes à une altitude de 55 m à Point Loma.

Aspects économiques [modifier]

Le coût en matière fissile était supposé élevé jusqu'à ce que Ted Taylor démontre qu'avec une conception adéquate des bombes, la quantité de matière fissile nécessaire à un lancement terrestre était à peu près constante quelle que soit la taille du véhicule de 2 000 à 8 000 000 t. Les vaisseaux plus petits utilisent plus de matière fissile car ils ne peuvent être basés sur des explosions thermonucléaires. Les vaisseaux plus grands utilisent plus d'explosif pour sur-comprimer le primaire fissile et réduire la contamination résultante.

Le coût de mise en orbite avec le plus grand Orion était de 11 cents/kg en dollars de 1958 (soit 70 cents/kg en dollars de 2005).

Problèmes potentiels [modifier]

De vrais tests sur banc d'essai étaient réputés infaisables à cause des milliers d'explosions nucléaires qu'il fallait effectuer au même endroit. Néanmoins, des expérimentations furent conçues pour tester la plaque de poussée au cours d'essais nucléaires. Des tests de plus longues durées étaient envisageables dans l'espace et plusieurs faillirent être mis sur pied. La conception des amortisseurs pouvait être testée en grandeur réelle sur Terre en utilisant des explosifs chimiques.

Le principal problème lié à un lancement terrestre est la contamination nucléaire. Freeman Dyson estimait alors qu'avec des bombes nucléaires ordinaires, chaque lancement provoquerait des cancers fatals pour 10 personnes dans le monde (le mode de calcul de cette estimation est contesté).

Les retombées du lancement d'un Orion de 5 500 t à fission ne correspondent qu'à une explosion de 10 mégatonnes (40 pétajoule). Grâce à une conception appropriée des bombes, Ted Taylor estimait que les retombées pouvaient être divisées par 10, ou même rendues nulles si la fusion pure était utilisée[citation nécessaire].

À basse altitude (durant le lancement), l'équipage peut être exposé à plus de retombées radioactives, et de plus, il y a le risque de bombardement par des éclats fluidifiés giclant du sol. Un vaisseau de 10 m de diamètre pouvait être monté sur le premier étage d'une Saturn V pour le début de l'ascension; pour les autres, la solution proposée consistait à utiliser un explosif conventionnel étalé sur la plaque de poussée pour le début de l'ascension avant d'activer la propulsion nucléaire quand l'altitude le permettait.

Dans les couches denses de l'atmosphère, la diffusion Compton pourrait également représenter un danger pour l'équipage. La solution consisterait à le réfugier à l'abri des radiations dans un compartiment au milieu de la cargaison et des équipements. Un tel refuge serait de toute façon nécessaire dans les missions lointaines pour résister aux éruptions solaires.

Le lancement terrestre d'une fusée Orion vers l'orbite basse engendrerait des impulsions électromagnétiques qui pourraient être fatales aux ordinateurs et satellites. Ce problème peut être résolu en procédant aux lancements dans des régions isolées (l'EMP n'étant néfaste que sur quelques centaines de kilomètres).

En orbite proche, la magnétosphère rabattrait vers la Terre des retombées radioactives, à moins d'allumer au dessus d'une région polaire.

Le fonctionnement proche d'un Orion inonderait d'énergie les ceintures de Van Allen et perturber les satellites en orbite. Mais la Terre elle-même est bien protégée des ceintures de Van Allen, de plus il existe des solutions relativement simples pour les décharger de leur flux de radiations à l'aide de câbles électrodynamiques.

Même dans l'espace interplanétaire, ce vaisseau et le programme d'essais nécessaire à sa mise au point violeraient le traité d'interdiction partielle des essais nucléaires de 1963. Néanmoins, certains objectent que ce traité est basé sur des suppositions obsolètes. Il est désormais établi que le milieu interplanétaire est particulièrement radioactif, le projet Orion n'y contribuerait pas de façon sensible. Le gouvernement américain tenta de faire introduire une exception dans le traité de 1963 afin de permettre la propulsion spatiale nucléaire, mais les soviétiques craignant un détournement militaire de cette exception, s'y opposèrent et empêchèrent la révision du traité nécessitant l'unanimité.

L'approche la moins nuisible serait l'assemblage du vaisseau en orbite par des moyens plus conventionnels et son mise à feu au-delà de la magnétosphère.

La stabilité était aussi un aspect problématique à cause de l'incertitude de la trajectoire des bombes éjectées, mais il fut démontré qu'à la longue, toutes les erreurs induites tendaient à s'annuler.

Le projet Daedalus, ainsi que les autres basés sur des microexplosions thermonucléaires, devraient contourner ces restrictions. Le système Daedalus se base sur des faisceaux de particules provoquant la fusion de pastilles d'environ un gramme et équivalentes à seulement 10-20 t de TNT.

Dans la science-fiction [modifier]

  • La première apparition du concept dans la littérature est dans le roman L'Empire de l'atome d'A. E. van Vogt (1956), où l'Empire de Linn utilise des fusées nucléaires de type Orion pour les voyages interplanétaires.
  • Dans la série Star Trek originale, l'épisode Au bout de l'Infini (For the World is Hollow and I Have Touched the Sky, 1968) met en scène un vaisseau génération construit à partir d'un astéroïde ferreux évidé et propulsé par un « moteur nucléaire pulsé de classe Orion » où des bombes à fission sont explosées dans des tuyères. Son périple dura 10 000 ans sur 30 années-lumière.
  • Dans le roman King David's Spaceship de Jerry Pournelle (1973), les habitants d'une planète voulant réintégrer l'empire du CoDominium doivent construire un vaisseau Orion afin d'être qualifiés de planète hautement développée.
  • Dans la nouvelle de Joe Haldeman Tricentennial (1977), récompensée par un prix Hugo, figure un vaisseau nommé Deadalus propulsé par des bombes nucléaires.
  • Dans l'anthologie Céphéïde de l'auteur hollandais Tais Teng, figure un vaisseau de type Orion décrit comme étant une des méthodes de voyage interstellaire les plus primitives et les plus polluantes. Le vaisseau est une relique d'une civilisation inconnue exterminée par les descendants des baleines à bosse.
  • Dans le roman Orion Shall Rise de Poul Anderson (1983), les restes d'une confédération déchue rassemblent du matériel nucléaire interdit dans un but inconnu — bien que le titre suggère la nature de cet objectif.
  • Un tel vaisseau tient un rôle important dans Footfall de Larry Niven et Jerry Pournelle (1985), où l'humanité confrontée à une invasion extraterrestre doit recourir à des moyens drastiques pour armer un vaisseau de combat.
  • Dans le roman La Captive du temps perdu (Marooned in Realtime) de Vernor Vinge (1986), la technologie des bulles de stase rend ce type de propulsion parfaitement sûr pour les passagers.
  • Dans le roman The Stone Dogs de Stephen Michael Stirling (1990), des vaisseaux Orion sont construits lors d'une course à l'armement et utilisés à des fins d'exploration et de guerre.
  • Dans le film Deep Impact de Mimi Leder (1998), une équipe russo-américaine doit sauver le monde d'une collision avec une comète en allant la miner avec le vaisseau expérimental Messiah. Son système de propulsion est appelé Orion bien que son apparence visuelle ne corresponde pas à ce principe; mais d'autre part, les caractéristiques ΔV - délai imparti imposent ce type de propulsion (pour peu que la vraisemblance soit un souci cinématographique hollywoodien).
  • L'histoire de fond du jeu vidéo Alpha Centauri de Sid Meier (1999) est celle d'un vaisseau hibernation propulsé par système Orion dont le bouclier lâche (probablement à cause d'un sabotage) juste avant d'arriver à destination, conduisant les occupants à se diviser en factions adverses.
  • Dans le roman Olympos de Dan Simmons (2005), des vaisseaux Orion sont conçus par une race mécanique pour imiter la technologie humaine.

Références [modifier]

  1. Le premier, développé par Martin, devait avoir une chambre de 40 m de diamètre et une Isp de 1 150 s. Le second, développé par LLNL et baptisé Helios, devait être plus petit.
    (en) Erik S. Pedersen, Nuclear Propulsion in Space, Prentice-Hall, 1964
  2. (en) Le tir Pascal-B et l'opération Plumbbob sur nuclearweaponarchive.org
  3. (en) Learning to Contain Underground Nuclear Explosions, le compte-rendu du tir Pascal B par le docteur Brownlee
  4. (en) Dunne, Dyson and Treshow, Dimensional Study of Orion Type Spaceships, General Atomics, 1959, GAMD-784
  5. (en) Descriptions de ICAN-II et Aimstar, ainsi que des techniques liées à l'antimatière

Liens externes [modifier]

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07/10/2007
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